Le piège

Le syndrome de « Pierre et le loup » est un piège terrible en médecine. Mais j’y suis encore tombé récemment, alors que je m’étais pourtant déjà promis plusieurs fois de ne jamais refaire la bêtise.

Je me croyais à l’abri, et bien non.

Un patient plus ou moins chronique, plutôt pénible, en tout cas que l’ensemble du personnel souhaite voir partir (en fait, un confrère!), plusieurs choses à gérer en même temps, et j’ai de nouveau sauté à pieds joints dans la trappe.

Pourtant je me répète souvent le mantra: oublier ses a priori, respirer, oublier ses a priori, ouvrir la porte, oublier ses a priori, questionner, oublier ses a priori, examiner, oublier ses a priori, faire la synthèse, oublier ses a priori….

J’ai traité assez cavalièrement une nième plainte qui s’est avérée, en définitive, justifiée. En fait, je n’y croyais pas, et suis allé voir tardivement le patient avec lequel j’ai été  assez désagréable.

C’est tout juste si je ne l’ai pas applaudi bruyamment pour son interprétation magistrale de la scène finale du troisième acte. Braaaavo!

Bon, il n’y a pas eu de conséquences, car j’ai été assez méthodique pour ne pas négliger de demander un bilan biologique qui a révélé le problème.

Le lendemain, je suis allé à Canossa, en fait dans sa chambre, avec une volonté flageolante de m’excuser.

Finalement, je ne l’ai pas fait.

Il faut dire aussi qu’il ne semblait n’avoir aucun souvenir de l’épisode de la veille.

La maladie a du bon, parfois.

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