Soupe de sorcière

Lasilix faible 20: 1 le midi

Seresta 10: 1 la nuit

Pritorplus 40/12.5: 1 le midi

Clopidogrel 75: 1 le midi

Uvedose 100000UI/2ml: 1 ampoule tous les 15 jours

Movicol: 2 le matin

Lasilix 40: 1 le matin

Hyperium 1: 1 matin et 1 soir

Dafalgan 500: 2 matin, midi et soir

Pantoprazole 20: 1 le soir

Bisoprolol 1.25: 1 matin et 1 le soir

Aspirine Protect 100: 1 le midi

Nefopam 20mg/2ml: 1 à 4 ampoules par jour (sur un sucre)

Loceryl 5% vernis: 1 le matin

Normacol lavement: 1 fois tous les 3 jours si besoin.

Discotrine 10mg/24h: 1 le matin

Je suis tombé sur cette ordonnance d’une dame de 86 ans, porteuse d’une cardiopathie ischémique, compliquée d’une décompensation cardiaque gauche sans facteur déclenchant évident. Elle a présenté trois semaines après sa sortie du service de cardio qui l’avait pris en charge une perte de connaissance précédée d’une lipothymie, alors qu’elle venait de s’asseoir. La patiente n’a pas présenté de précordialgie, ni de dyspnée, son ECG est inchangé. Le test de recherche d’hypotension orthostatique effectué le lendemain est très positif.

J’ai publié cette ordonnance sur Twitter et j’ai, vous pouvez bien l’imaginer, eu des tas de réponses puisque nous sommes devant une magnifique soupe de sorcière, probablement bien impliquée dans la perte de connaissance de la patiente.

L’empilement d’antihypertenseurs, de diurétiques divers et variés et de cette satanée trinitrine en patch représente un facteur de risque majeur d’épisode hypotensif chez le sujet âgé. Sur ce risque de chute, rajoutez une saignante association d’antiagrégants plaquettaires et vous pouvez vite donner vie à un cauchemar iatrogène.

J’ai largement sabré dans les médicaments cardio-vasculaires, mais je n’ai pas arrêté un des deux antiagrégants, n’ayant pas d’info sur le statut coronaire de la patiente (endoprothèse? Quand?…).

Rien de bien neuf sous le soleil après cette histoire, mais ce cas de iatrogénie par polymédicamentation pointe du doigt une fois de plus ce fléau qui touche principalement ceux qui y sont le plus sensibles, manque de chance, les personnes âgées.

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Pour en savoir plus et approfondir un peu le débat:

Soupe Maison

Celle-là est pas mal:

  • allopurinol 100
  • Seretide® Diskus 500/50
  • Kredex 12.5®*2
  • Amlor 10®*1
  • ipratroprium 0.5*3
  • Lasilix faible®*1
  • Isoptine 40®*3

Mais je n’en suis pas fier, et  j’ai donc couvert mes cheveux de cendres puisque c’est moi qui l’ai faite avec mes petits doigts potelés.

En fait j’ai rajouté de l’Isoptine pour ralentir le patient, sans avoir vu/fait attention à la dihydropyridine et au bêta-bloquant qui étaient déjà là….

Heureusement le patient n’a rien eu et un collègue a corrigé le tir.

Dommage que je ne puisse pas vous raconter dans quelles circonstances très ironiques j’ai appris ma bourde.

La vie est parfois très taquine.

Petite soupe de sorcière

Elle est pas mal celle-là, à la fois légère et relevée.

Une soupe d’été, en somme.

Une dame hypertendue d’environ 70-75 ans, aux antécédents de fibrillation auriculaire consulte pour la première fois un ami  médecin généraliste. Elle est suivie par ailleurs par un cardiologue.

Elle décrit une grande fatigue.

Son traitement:

  • Monotildiem LP 200*1
  • Ténormine 50*2
  • Cordarone*1
  • Aldactone 75*1
  • Préviscan

Cinq lignes, 4 interactions, dont 1 association déconseillée, respect.

Soupe de sorcière

Elle arrive vers ses 90 ans et m’est adressée pour un bilan cardiovasculaire car ses jambes se dérobent sans aucun malaise, ce qui la fait tomber dans la rue.

Comme antécédent: HTA, probablement fibrillation auriculaire et grosse dépression début des années 90, dont elle n’est jamais totalement sortie.

Traitement actuel:

  • Atarax 100®
  • Ludiomil 25®
  • Stilnox 10®
  • Xanax 0.25®
  • Seroplex 5®
  • Lamaline®
  • Aprovel 150®
  • Kardégic 75®
  • Crestor 5®
  • Hémigoxine 0.25®
  • Serecor 300®
  • Vastarel 35®
  • Pantoprazole 40®
  • Myolastan 50®
  • Calcium 500®
  • Forlax®
  • Zondar®

Mon bilan est parfait, et n’explique donc pas ses chutes qui ne m’évoquaient de toute façon rien de bien cardiaque ou vasculaire.

J’ai arrêté l’hémigoxine® dont l’association avec le Serecor® est assez exotique (risque de torsades).

Surtout, mon petit doigt m’a susurré une cause iatrogène pour ses symptômes.

J’ai donc suggéré d’élaguer largement cette ordonnance. Mais la patiente qui est très alerte tient beaucoup à tous ses comprimés, et je pense qu’il va être difficile de le lui faire accepter.

Je regrette maintenant de ne pas avoir barré le Vastarel® et le Crestor®, mais j’ai essayé de concentrer mes explications sur le pléthorique traitement psychotrope.

Servir une telle soupe à une dame de 90 ans, ça me semble inouï.