C’est souvent en fin de journée qu’il faut réanimer.
Je ne sais pas pourquoi, encore une preuve de l’universalité de la loi de Murphy.
Récemment, c’était à 15 minutes de la fin de ma journée.
Cette réanimation s’est mal terminée, et ça c’est assez mal passé avec la famille. Bref, deux heures cauchemardesques.
C’est un problème fréquent avec les patients précaires que l’on arrive tant bien que mal à stabiliser pendant quelques semaines, voire quelques mois. Leur vie est limitée au triangle lit-toilettes-fauteuil et ils sont sous oxygène toute la journée. Mais ils continuent à vivre et à avoir une certaine vie de relation avec leurs proches. Leur famille s’habitue donc à cet état de fait, et quand les choses s’accélèrent, ils ne comprennent pas.
Cette résilience est bien entendue nécessaire pour permettre à la famille de continuer à vivre malgré la décrépitude d’un des siens.
Mais elle rend difficile le travail du soignant qui gère les dernières heures ou les dernières minutes.
Mais elle/il était si bien hier/ce matin/cette après-midi!!
Ben oui, mais il/elle n’avait plus de cœur et/ou foie et/ou poumon et/ou rein et/ou cerveau….
Et ça, c’est très difficile à faire comprendre.
Je me suis donc disputé avec une famille, et j’en garde un goût amer.
Quand je suis rentré à la maison, je me suis fait une tartine de beurre salé sur du pain, et j’ai trouvé que c’était la chose la plus délicieuse du monde.
Puis j’ai raconté mes malheurs à mon épouse.