Dronédarone

J’entends de plus en plus parler de dronédarone (Multaq®), le nouvel antiarythmique qui avait pour ambition de détrôner la redoutable amiodarone, si efficace, mais aux si nombreux effets secondaires.

J’avoue aussi avoir suivi son début de carrière d’une oreille un peu distraite, un peu occupé par d’autres choses.

l’EMA (le nouveau nom de l’EMEA) l’a approuvée le 30 novembre dernier (RCP disponible ici).

Le rapport public d’évaluation n’est toutefois pas particulièrement élogieux:

 

Pourquoi Multaq a-t-il été approuvé?
Le comité des médicaments à usage humain (CHMP) a estimé que, bien que Multaq soit moins efficace qu’un médicament comparateur
[NDLR: l’amiodaone] pour maintenir un rythme cardiaque normal, il pourrait avoir moins d’effets indésirables. Multaq s’est également avéré plus efficace qu’un placebo pour prévenir une récidive de la fibrillation auriculaire et pour contrôler la fréquence cardiaque. Dans les études principales, le nombre de patients qui ont pris Multaq et la durée pendant laquelle ils ont pris ce médicament ont également permis au comité de procéder à une évaluation appropriée de ses bénéfices et de ses risques.

 

Dommage qu’il n’y ait pas eu des comparaisons contre les autres antiarythmiques.

Maintenant, le souci est que l’amiodarone reste principalement utilisée chez les patients chez qui on ne souhaite pas prescrire les classes I, c’est à dire notamment les insuffisants cardiaques ( et les patients ayant comme antécédent  un infarctus du myocarde (aigu ou ancien) sauf en cas de tachycardie ventriculaire menaçant le pronostic vital)

Or la dronédarone est malencontreusement contre-indiquée chez les: »Patients présentant des conditions hémodynamiques instables incluant les patients avec des symptômes d’insuffisance cardiaque au repos ou lors d’un effort minime (correspondant aux patients de classe IV NYHA et de classe III NYHA instables)« .

Cela limite donc pas mal son utilité effective en pratique clinique. Car un insuffisant cardiaque stable, en I, II, III, ou IV reste fragile, et ne demande pas souvent la permission à son cardiologue pour se déstabiliser et augmenter de classe.

Les amateurs d’interactions médicamenteuses remarqueront par ailleurs que la dronédarone est métabolisée par la CYP3A4, mais aussi qu’elle est un inhibiteur modéré du CYP3A4, un inhibiteur faible du CYP2D6 et un inhibiteur puissant de la glycoprotéine P (P-gp). La dronédarone peut donc potentiellement interagir sur les médicaments substrats des glycoprotéines P, du CYP3A4 ou du CYP2D6.

Ce qui induit pas mal d’interactions toutes plus drôles les unes que les autres que je vous laisse découvrir dans la section 4.5 du RCP.

Enfin, elle est aussi contre-indiquée en cas de clairance de la créatinine inférieure à 30 ml/min et  allonge  modérément le Qt.

Bref, la dronédarone a moins d’effets secondaires que l’amiodarone au prix d’une efficacité moindre et d’une utilisation plus restreinte et plus délicate du fait des contre-indications et des nombreuses interactions.

Le NICE de la NHS britanique qui prend aussi en compte le prix élevé de la dronédarone va probablement rendre un avis définitif défavorable, si l’on en croit le rapport provisoire qui est consultable ici et dont la conclusion est remarquablement concise: « Dronedarone is not recommended for the treatment of atrial fibrillation. » (communiqué de presse ici).

C’est bien dommage car la molécule qui remplacera l’amiodarone en ayant son efficacité sans ses effets secondaires est un bien vieux serpent de mer de la cardiologie et certainement un Eldorado pour la firme pharmaceutique qui le mettra au point.

Pour lire l’ensemble de mes notes sur la dronédarone, c’est ici.

 


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Comme on est en début d’année et que je me sens d’humeur badine, je vais vous donner un truc que l’on m’a appris il y a peu pour pouvoir utiliser le site de l’EMA qui est particulièrement touffu et peu ergonomique.

D’abord, leur nouvelle adresse: http://www.ema.europa.eu/

Pour être précis, on va voir comment trouver rapidement un RCP en français.

Si l’anglais vous convient, il vous suffit de taper la DCI ou le nom commercial du produit en haut et à droite dans la fenêtre de recherche.

Sinon:

Clic sur l’onglet « Human Medicines » en haut

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Clic sur « EPARs » (« European Public Assessment Reports »)

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Clic sur « A-Z Listing of EPARs »

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Puis vous cherchez dans l’index alphabétique le nom commercial de la molécule désirée, par exemple ici le Multaq®:

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Il ne vous reste plus qu’à cliquer sur le « u » français  du tableau « Product Information ».

Et voilà!


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