Notes de chevet de Sei Shōnagon

L’exposition Hokusai du Grand Palais a été l’occasion de la parution de nombreux ouvrages sur cet artiste remarquable. En musardant à la FNAC, j’ai repéré l’intégrale de la Manga pour un achat ultérieur, mais je suis tombé sous le charme des Notes de chevet de Sei Shōnagon.

IMG_7914L’ouvrage est somptueux, et le parcourir est un régal pour les yeux et les doigts. Les éditions Citadelles & Mazenod ont rassemblé dans une vraie merveille des œuvres de Hokusai et un texte écrit au onzième siècle par Sei Shōnagon, poétesse et  dame de compagnie de l’impératrice.

IMG_7909Je ne connaissais ce texte que par lectures interposées, et sous le titre trompeur « Notes de l’oreiller/The pillow book ».

Le traducteur, André Beaujard éclaire l’existence de ces différents titres:

Dans les anciens textes, l’ouvrage qu’elle nous a laissé est appelé simplement Sei Shônagon no ki, «Le livre de Sei Shônagon ». Le titre que l’on emploie aujourd’hui, et que Sei n’avait probablement pas choisi, est Makura no Sôshi.
On en découvre l’explication vers la fin de ses mémoires, où elle raconte comment, à l’impératrice qui lui montrait une grosse liasse de papier en demandant ce qu’il faudrait écrire là dessus, elle répondit qu’elle en ferait un makura ; d’habitude on traduit ce mot par « oreiller » ; mais à vrai dire il désigne un support, une pièce de bois plus ou moins rembourrée à la partie supérieure, et qui, soutenant la nuque, peut permettre aux élégantes de ne pas trop gâter, pendant leur sommeil, la belle ordonnance de leur coiffure :quelque chose, on le voit, qui est assez différent de notre oreiller. Aussi bien, le contexte prouve que la dame d’honneur, prenant le papier qu’on apportait, pensait l’employer à noter ses impressions, le soir,dans le silence de sa chambre. En donnant aux esquisses de Sei le titre qu’elles ont gardé, les japonais ont sans doute été heureux de mettre à profit la ressemblance du mot makura avec un autre, makkura, qui signifie « très sombre», et qui rappelle justement le début du chapitre. Ainsi entendu, le titre convient fort bien à un ouvrage qui a grand besoin d’être éclairé. Il est souvent traduit par « Notes de l’oreiller » ; pourtant j’ai préféré, me fondant sur ce qui précède, le rendre par « Notes de chevet ».

Rien d’érotique en effet dans ce recueil de notes écrit par une lettrée japonaise du XIième siècle, j’insiste sur cette date, car son extraordinaire distance, 1000 ans en rend le lustre incomparable. Sa rédaction serait plus ou moins contemporaine d’un célèbre roman de cour que j’ai toujours été incapable de lire, Le dit du Genji.

IMG_7900Les notes, elles, se lisent très bien. Il s’agit d’images, qui ont l’air d’avoir été tracées d’un coup de pinceau rapide et fluide sur un élégant papier, et c’est là que réside le génie d’avoir rapproché cette concision et cette élégance des dessins de Hokusai. Sei Shōnagon observe la nature, les membres de la cour impériale, et leurs serviteurs et en tire des impressions courtes, drôles ou mélancoliques.

Ce qui m’a frappé au delà de tout est l’universalité des notes de cette femme, écrites à des milliers de kilomètres et un millénaire de distance, et qui pourtant me touchent et me parlent.

Gens qui prennent des airs savants

Les enfants d’aujourd’hui, à trois ans.

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Choses sereines.

Lire bien au chaud les Notes sur un bon canapé de cuir, éclairé par la lumière rasante d’un soleil d’hiver.

3 Replies to “Notes de chevet de Sei Shōnagon”

  1. SI le « dit du genji » ne vous va pas, tentez la version de l’autre famille avec « la chronique des Heïke » de Eiji Yoshikawa.

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