C’est le titre du grave éditorial en tête du dernier numéro de « Cardiologie Pratique » daté du 4 mars 2009.
Le constat est sans appel. L’industrie pharmaceutique est malade d’une sur-réglementation injuste qui fait diminuer ses ressources, elle réduit donc ses coûts, notamment le nombre d’encarts publicitaires dans la presse médicale. L’éditorial appelle donc au secours ses lecteurs en leur demandant de s’abonner.
Je cite un extrait: « Un journal de cardiologie vit, en général, grâce à ses abonnés et surtout grâce à ses ressources publicitaires. ce sont ces dernières qui se tarissent. Soumise à des pressions de plus en plus lourdes, à des règlements tatillons, à une politique de taxation et de surtaxation, à des amendes énormes généreusement distribuées sans motif sérieux, victime d’une politique du « tout générique », l’industrie pharmaceutique connaît une des périodes les plus difficiles de son histoire. »
Je précise que je suis abonné depuis des années à « Cardiologie Pratique », comme la plupart de mes collègues, et cela sans avoir versé un seul centime, ni avoir envoyé une demande d’abonnement. Je présume donc que c’est un laboratoire pharmaceutique qui le paye pour moi, comme pour tous les autres.
La méforme actuelle de l’industrie pharmaceutique a donc probablement un double impact: cette dernière ne s’achète plus d’espaces publicitaires dans des journaux qu’elle finance en partie en abonnant d’office des médecins.
Par ailleurs, je trouve cet éditorial incroyablement courageux car, à ma connaissance, c’est la première fois qu’un rédacteur en chef d’une revue médicale exprime et revendique noir sur blanc sa dépendance en l’industrie pharmaceutique.
Quelles solutions pour sortir de la crise?
Le rédacteur en chef en propose une en lançant un « abonnez-vous! » percutant. Est-ce à dire que je dois prendre un nouvel abonnement en plus de celui du labo pour soutenir « Cardiologie Pratique »?
Je propose modestement quelques pistes.
- Pourquoi ne pas faire le pari de l’indépendance vis à vis de l’industrie pharmaceutique?
- Pourquoi ne pas publier des articles intellectuellement honnêtes sur les nouvelles thérapeutiques et les essais cliniques?
- Pourquoi ne pas, par exemple, publier une série d’articles qui nous apprennent à séparer le bon grain de l’ivraie parmi les informations médicales que nous lisons ou écoutons chaque jour (je pense bien sûr à quelques données fondamentales de statistique médicale)?
- Pourquoi ne pas faire confiance en l’intelligence et le désir d’apprendre du lecteur?
En un mot, pourquoi ne pas faire le pari de la qualité et de l’indépendance qui intéresseraient, j’en suis certain, un véritable lectorat régulier et fidèle (même parmi les cardiologues) et non de compter, pour exister, sur une liste de noms à abonner dans le Filofax rouge d’une visiteuse médicale?
Je sais à quoi vous pensez. Ce tableau idéal de la presse médicale est le reflet presque exact de la revue Prescrire.
Et vous avez raison.
D’ailleurs, c’est drôle, le hasard est vraiment taquin, car dans le numéro de mars 2009, comme chaque année, la revue fait un petit résumé de ses finances.
Comme vous pourrez le constater ici (en accès libre), les choses vont plutôt bien.
La qualité est gagnante, parfois. Heureusement.
05/03/09, 20h50. Quelques modifications stylistiques et orthographiques et rajout du lien vers le site de Prescrire.
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