On m’a demandé d’aller voir une dame pour laquelle un scanner thoraco abdominal a mis en évidence une dilatation d’une veine iliaque.
Elle était très angoissée par cette trouvaille tout à fait bénigne, et on m’a donc demandé de la rassurer.
Pourquoi lui a-t-on fait un scanner me demanderez-vous?
Bonne question, elle est même centrale, c’était pour faire le point sur un cancer métastasé de partout après l’échec d’une première ligne de chimiothérapie. On envisage une seconde ligne, une troisième, ad libitum…
Je l’ai rassurée.
Je présume (j’interprète) que la patiente fixait donc son angoisse sur le détail veineux pour ne pas voir le reste. Je suis persuadé que ce défaut de focalisation est un moyen inconscient de protection pour le patient, voire pour le soignant (pour sa propre protection, et celle de son malade).
La cardiologie n’est heureusement pas une spécialité trop « terminale », le plus souvent tout va très vite. Mais je me suis assez souvent dit qu’un patient, une famille, des soignants prêtaient souvent une attention totalement démesurée à un détail parfois même indépendant de la maladie principale. Mais ce détail, c’est le plomb qui empêche que tout ne disjoncte.
En sortant de sa chambre, je me suis demandé si j’avais bien fait de balayer ce souci qui était peut-être un bon moyen de canaliser son angoisse.
Elle a vite levé mes scrupules.
« Merci de m’avoir rassuré, ce n’est rien par rapport au reste…. »
Bonne interprétation à mon sens 😉
Les mécanismes d’adaptation psychologique à la maladie sont tellement diverses que je ne sais pas si on peut en tirer des règles générales.
Certains vont effectivement focaliser sur un détail mineur pour éviter de penser aux choses grave. D’autres vont se sentir débordés au contraire par les petites choses qui se surajoutent.
Apparemment ton feeling a été le bon, et tu as eu le discours qu’il fallait.
Si tu savais la proportion de patients qui sont préoccupés par leur transit alors qu’ils ont reçu une chimiothérapie pour une leucémie aiguë, en chambre stérile…
Les familles font de même, parfois mieux vaut se focaliser sur un détail plutôt que sur l’annonce de la maladie ou pire du pronostic parfois catastrophique…
« Docteur, vous ne continuez pas son daflon pour ses jambes ? »