Je ne suis pas un fanatique du pamplemousse, mais j’en ai un spectaculaire au fond de mon jardin.
Par ailleurs, outre la beauté de l’arbre et de sa magnifique fleur, le jus de pamplemousse est doté de propriétés pharmacologiques tout à fait intéressantes, et parfois inquiétantes.
La naringine et la naringénine sont de puissants inhibiteurs du cytochrome P450 3A4 (CYP3A4) et dans une moindre mesure du CYP1A2 et du CYP3A5.
On trouve le CYP3A4 au niveau des entérocytes de l’intestin grêle et au niveau du foie.
Le jus de pamplemousse agit donc sur ces 2 sites, augmentant la biodisponibilité du substrat du CYP3A4 au moment du passage dans le système porte ainsi que son métabolisme au niveau hépatique.
Cela induit une nette augmentation des concentrations plasmatiques du substrat et peut devenir problématique quand ce dernier est un médicament.
Et il y en a des tas qui sont métabolisés par le CY3A4 (et les autres dans une moindre mesure):
- Liste de Wikipedia
- Liste de « Australian Prescriber » (février 2002)
- Liste du CMAJ (août 2002)
Ces longues listes ne sont pas faciles à intégrer, et pour compliquer le tout, l’activité des CYP3A4 est éminemment variable entre chaque individu (avec un rapport de 1 à 8), ce qui rend donc très variable l’intensité de l’interaction pamplemousse/médicament.
Il faut bien évidemment se méfier en tout premier lieu des molécules ayant un index thérapeutique étroit.
Pour vous donner une idée de l’intensité de cette interaction, un verre de 250 ml de jus de pamplemousse triple l’aire sous la courbe de la félodipine, et la durée de l’interaction a une demi vie de 12 à 24 heures.
Une étude faite en 1996 sur des transplantés rénaux montre jusqu’à un triplement de la concentration plasmatique de ciclosporine chez un patient.
Pour les médicaments cardiovasculaires, les papiers conseillent en général la prudence pour les molécules suivantes (mais parfois, les avis sont un peu divergents…):
- diltiazem (beaucoup d’avis divergents)
- vérapamil (idem)
- statines (atorvastatine, simvastatine, lovastatine-non commercialisée en France-, parfois pravasatine)
- amiodarone
- ciclosporine
- dihydropyridines (félodipine, parfois nifedipine et amlodipine)
- tacrolimus et sirolimus
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Outre le CMAJ et « Autralian Prescriber »:
Pillai U, Muzaffar J, Sen S, Yancey A. Grapefruit juice and verapamil: a toxic cocktail. South Med J. 2009 Mar;102(3):308-9.
Sica DA. Interaction of grapefruit juice and calcium channel blockers. Am J Hypertens. 2006 Jul;19(7):768-73.
Lefebvre Lyse. Interaction médicament-aliments: le jus de pamplemousse. Bulletin d’Information Toxicologique 1999. Volume 15, numéro 3.