Ca y est, elle arrive vraiment!
Dans le précédent épisode, nous avons appris grace au programme « La tension sous pression » que l’HTA résistante touchait 100 millions de personnes dans le monde entier! 100 millions! Par ailleurs, nous avons aussi appris que ces patients sont particulièrement préoccupés d’être porteurs d’une HTA résistante. D’où le cri du coeur du communiqué de presse: Les patients français ont besoin de nouvelles solutions thérapeutiques.
À la fin de ce communiqué, le lecteur, patient ou médecin se retrouve alors dans un état de stupeur et de tremblements. Il attend avec fébrilité un message d’espoir.
Celui-ci se manifeste dans le Cardiologie Pratique du 8 février.
Nous entrevoyons en effet la lumière au bout de l’artère rénale, puisque le premier journal cardiologique français consacre une pleine page à la dénervation rénale, avec juste à côté une énorme publicité pour le système de dénervation Medtronic (qui, hasard étonnant, finance par ailleurs le programme « La tension sous pression »).
La campagne est donc lancée, je prédis dans les prochaines semaines un déferlement d’articles et d’EPU sur l’HTA résistante 😉
Le Dr Braillon nous faisait part dans une correspondance à la revue la Presse Médicale que les stents de l’artère rénale ne faisaient pas mieux que le traitement médical dans les sténoses de l’artère rénale. Or 50 000 stents de l’artère rénale sont néanmoins posés aux USA en 2010. Pourquoi? Selon le même auteur l’explication viendrait du fait que les dispostifs médicaux auraient une procédure d’AMM moins contraigante que les médicaments. Votre post sur la dénervation rénale à l’aide d’un dispositif médical m’y fait penser. Vous pouvez trouver les coordonnées de la correspondance du Dr Braillon ici:
http://philippehavinh.wordpress.com/2012/01/21/implanted-cardiovascular-devices-and-pip-breast-implants-what-have-they-in-common/
Bien cordialement
(suite)
Voici deux études sur cette technique de dénervation rénale:
1) une étude de cas:
Krum H, Schlaich M, Whitbourn R, et al. Catheter-based renal sympathetic denervation for resistant hypertension: a multicentre safety and proof-of-principle cohort study. Lancet2009;373:1275-1281
We enrolled 50 patients at five Australian and European centres; 5 patients were excluded for anatomical reasons (mainly on the basis of dual renal artery systems). Patients received percutaneous radiofrequency catheter-based treatment between June, 2007, and November, 2008,
2)et un essai randomisé (petits effectifs):
Renal sympathetic denervation in patients with treatment-resistant hypertension (The Symplicity HTN-2 Trial): a randomised controlled trial. The Lancet, Volume 376, Issue 9756, Pages 1903 – 1909, 4 December 2010.
106 (56%) of 190 patients screened for eligibility were randomly allocated to renal denervation (n=52) or control (n=54) groups between June 9, 2009, and Jan 15, 2010.
Ces études montrent une efficacité mais les effectifs sont faibles.
Salut,
je me permets de vous solliciter sur les conseils d’un lecteur du blog « docteurdu16 », sur lequel j’ai posté il y a qq jours un SOS à propos d’une recommandation non argumentée dans le traitement de l’HTA.
Je vous laisse découvrir de quoi il s’agit, voici la teneur de mes propos :
« Je viens donc ici comme un petit caliméro réclamer l’aide de mes ainés (= vous), quant à l’interprétation d’un document présenté comme informatif, émanant des, je cite : comité français de lutte contre l’hta, société française neuro-vasculaire, et société française d’hta. Que des gens bien.
Je n’ai pas encore pris la peine de googliser tout ça tellement je suis à peu près sûr de ce que je vais découvrir.
Voilà, ce courrier, reçu par la poste aujourd’hui même, m’apprend à travers un petit guide de « bonne pratique » (gniark gniark !) que, je cite encore : « si un hypertendu traité n’est pas contrôlé par la monothérapie initiale, le passage à la bithérapie sera plus efficace que le doublement de la dose de la monothérapie », point, à la ligne.
Aucune référence.
Les bras m’en tombent un peu, because cela contredit ce que j’ai appris en fac, et appliqué jusqu’à ce jour, à savoir qu’il était préférable d’augmenter croissant la dose de la monothérapie de 1ère ligne avant de commencer à faire des cocktails, avec addition d’effets indésirables et d’interaction, etc.
D’autant plus que la revue Prescrire, dans une synthèse de mars 2008 intitulée « hypertension artérielle : traitement de deuxième ligne : d’autres monothérapies », semble prétendre que même en cas d’échec d’une première monothérapie, il est préférable d’instaurer une autre monothérapie ayant fait ses preuves plutôt que d’embrayer sur une bithérapie.
Argh !!!… Qui croire ?!!!…
Suis-je totalement parano, à me représenter d’emblée des sociétés savantes aux intérêts convergents avec ceux des « industriels du médicament », tentant de me faire passer un message à peine subliminal : « prescrivez des anti hypertenseurs en association, plus modernes, plus nouveaux, plus brillants, plus mieux, plus… chers… » ?
Oui, non, c’est sûr, je suis parano.
Qui ne le serait pas, à ma place ?… »
Merci d’avance pour votre contribution à mon déniaisement.
Frédéric
Voici ce que l’on pouvait lire en 2005 en bas de la page 15 du document de la HAS:
« Augmentation des doses : recommandée en fonction du profil de tolérance du traitement et sachant que selon les classes
thérapeutiques, l’augmentation des doses n’aboutit pas systématiquement à une augmentation de l’efficacité. »
Hélas cette recommandation de bonne pratique a été suspendue dans
l’attente de son actualisation. Voici le lien:
Cliquer pour accéder à hta_2005_-_recommandations.pdf
Une nouvelle recommandation est en cours:
Cliquer pour accéder à cp_recos_suspendues_19092011_vdef.pdf
Bien confraternellement.
Je pense qu’il faut au moins atteindre les posologies préconisées au Vidal , après les recommendations de la HAS de 2005 précisaient que: “Augmentation des doses : recommandée en fonction du profil de tolérance du traitement et sachant que selon les classes thérapeutiques, l’augmentation des doses n’aboutit pas systématiquement à une augmentation de l’efficacité.”
Mais elles sont suspendues et en cours de réécriture.
Cordialement
Les recommandations ESC en date (2007): http://www.escardio.org/guidelines-surveys/esc-guidelines/GuidelinesDocuments/guidelines-AH-FT.pdf pages 1435 et 1496
Petite précision quant à la pseudo-recommandation incriminée.
J’ai omis de vous citer la phrase qui suivait, et qui a son importance me semble-t-il.
Je reprends donc l’ensemble du paragraphe :
« Si un hypertendu traité n’est pas contrôlé par la monothérapie initiale, le passage à la bithérapie sera plus efficace que le doublement de la dose de la monothérapie.
Le choix d’une association fixe est à privilégier car elle permet de garder la simplicité de prescription d’un seul comprimé qui favorise l’observance du traitement. »
Le message que je reçoit est donc le suivant : devant la découverte d’une hypertension essentielle
1) monothérapie à posologie faible
2) bithérapie en association fixe d’emblée si échec de 1)
Vous comprenez mon trouble ?
Suis tout à fait d’accord avec l’HAS dans le sens ou dans certaines situations il est préférable d’aller vers une bithérapie plutôt que de forcer la dose d’une monothérapie qui risque d’engendrer des effets indésirables majeurs, par ex les inhibiteurs du système rénine-angiotensine chez des patients à la fonction rénale précaire, le risque d’hyperkaliémie, etc.
Mais de là à ne même plus essayer la majoration de posologie du ttt de première ligne, il y a un pas, non ?
D’autre part, si comme semble le suggérer l’HAS « selon les classes thérapeutiques, l’augmentation des doses n’aboutit pas systématiquement à une augmentation de l’efficacité”, j’aimerais bien être tenu au courant des dites classes thérapeutiques ! Et puis la formulation me paraît un tantinet obscure, « n’aboutit pas systématiquement », ça fait pas très EBM je trouve.
En même temps, venant de l’HAS…
Selon les recommendations de l’European Society of Cardiology transmises par le Dr Vailloud, il semble que dans certains cas il faille d’emblée débuter par une bi thérapie sans même tester une monothérapie en première intention: je cite:
« In the 2003 ESH/ESC Guidelines
the recommendation was
given not to limit two-drug treatment to a frequently
necessary step after attempting monotherapy, but also to
consider two-drug treatment as an alternative to monotherapy as a first choice therapeutic approach (Figure 3). »
[Page 1495 en haut à droite]
« Accordingly, combination
treatment should be considered as first choice particularly
when there is a high cardiovascular risk, i.e. in individuals
in whom blood pressure is markedly above the hypertension
threshold (e.g. more than 20 mmHg systolic or 10 mmHg
diastolic), or milder degrees of blood pressure elevation
are associated with multiple risk factors, subclinical organ
damage, diabetes, renal or associated cardiovascular
disease. » [meme page en bas à droite].
Très bien !
Deux petites questions (vous voudrez bien excuser mon ignorance, qui est sans borne) :
– quel est le niveau d’indépendance des experts élaborant les recommandations de l’ESC ?
– ces recommandations sont elles basées sur des études de morbi-mortalité comparant association fixe versus monothérapie ? Sur des études ciblant l’amélioration du facteur intermédiaire tension artérielle ? Sur autre chose ?
Encore un grand merci pour vos réponses.
Et ben, demande-le leur:
Correspondence to Giuseppe Mancia, Clinica Medica, Ospedale San Gerardo, Universita Milano-Bicocca, Via Pergolesi, 33 – 20052 MONZA (Milano), Italy Tel: +39 039 233 3357; fax: +39 039 32 22 74, e-mail: giuseppe.mancia@unimib.it
Correspondence to Guy de Backer, Dept. of Public Health, University Hospital, De Pintelaan 185, 9000 Ghent, Belgium Tel: +32 9 240 3627; fax: +32 9 240 4994; e-mail: Guy.DeBacker@ugent.be
😉
Normalement les déclarations de conflit d’intêret sont sur les sites des ESC et ESH comme précisé dans leurs reco de 2007:
« The affiliations of Task Force members are listed in the Appendix. Their Disclosure forms are available on the respective society Web Sites. »
En fait je n’ai rien trouvé.
En googelisant le premier auteur il a été conseiller de Boeringher. Ce qui ne veut pas dire que les recommendations sont forcément biaisées. Il est normal qu’un Professeur puisse conseiller un labo selon moi.
Disclosure: Giuseppe Mancia, MD, has disclosed that he has received consulting fees and speaking honoraria from Boehringer Ingelheim GmbH
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2344121/
Il ne faut pas perdre de vue que ce genre de recommendations sont considérées par les tribunaux comme « données acquises de la sciences ». Cependants elles n’annulent pas la responsabilité du prescripteur.
« Et ben, demande-le leur » 😉
Comme je suis un ferme partisant du moindre effort, moi aussi j’ai demandé à google. Tiens, en googlisant le deuxième, voilà ce qu’on peut obtenir :
« Current:
Sales & Marketing Mng at APB-Belgian Pharmaceutical Association-Association Pharmaceutique Belge-Algemene Farmaceutische Bond
Past:
Sales Mng at Prodis -Pharmadeal, Account Mng at Productor, Sales Manager at Pharmasales, Sales Manager at Pharmassist Belgium, Key Account Office… »
Mais sûr qu’un bon scientifique a le droit de travailler pour l’industrie.
Quant à en faire un dispensateur de recommandations considérées comme “données acquises de la science”…
Pour ma part j’en étais bêtement resté à l’hydrochlorothiazide en première intention, horrible réactionnaire anti moderniste que je suis. La seule molécule ayant montré un véritable bénéfice en terme de morbi-mortalité, la moins chère, la mieux tolérée, tout ça.
Je serai curieux de recueillir un avis cardiologique éclairé sur la question, bien que sur ce coup la je fasse aussi preuve de fainéantise.
Après tout je n’ai qu’à me lancer dans une bonne recherche biblio et me faire mon idée tout seul, pas vrai ?
Je lance un appel enflammé à toutes les âmes charitables qui habitent cet excellent blog, et qui dans leur grande bonté m’éviteront ce pénible labeur en m’invitant à me désaltérer à la source de leur précieux savoir.
Je ne peux pas faire plus.
Please.
« Après tout je n’ai qu’à me lancer dans une bonne recherche biblio et me faire mon idée tout seul, pas vrai ? »
Pas mieux.
C’est le sens profond du Trinch! rabelaisien!
Vous pourriez aussi faire une revue de la littérature sur le recul de la prévalence de l’insuffisance cardiaque et des décès par AVC ou Infarctus du myocarde depuis l’apparition de ces nouvelles molécules. Ces maladies ont fortement régressées ce qui a entraîné un forte diminution des hospitalisations en cardiologie. Citation:
« .in Cardiovascular Disease and Stroke meeting in Washington D.C. The largest was a 32 percent drop in hospitalizations for coronary artery disease, followed by a 22 percent decrease for heart attacks, and a 17 percent drop in heart failure hospitalizations. This is an important trend to note, as heart disease is the leading cause of hospitalizati… » Voir le lien:
http://www.fiercehealthcare.com/story/heart-issue-hospitalizations-drop-among-medicare-patients/2011-05-12?utm_medium=rss&utm_source=rss
Oui !…
On pourrait aussi le prendre comme le sens profond du « marche ou crève », et du « chacun pour sa gueule », qui imprègne si profondément nos études et notre profession.
Merci pour cet échange.
Je ne pense pas que les membres des comités qui rédigent des recommendations aient la mentalité que vous décrivez, puisque par définition ils oeuvrent à la diffusion et à la dissémination d’un savoir et d’une connaissance. Vous puvez être en désacord avec leur recommendations mais je ne vois pas où est l’égoisme dans cette démarche.
Pardon Ha-Vinh !
Ce commentaire ne vous était pas adressé.
Merci pour le partage d’informations.
J’en profite quand même pour rebondir sur une idée que vous avancez :
« Je ne pense pas que les membres des comités qui rédigent des recommendations aient la mentalité que vous décrivez, puisque par définition ils oeuvrent à la diffusion et à la dissémination d’un savoir et d’une connaissance ».
Là pour le coup, je pense qu’on frise la naïveté ! Accorder crédit à des comités d’experts au seul prétexte « qu’ils oeuvrent à la diffusion et à la dissémination d’un savoir et d’une connaissance », excusez moi mais c’est un peu léger !
On pourrait par exemple dire que les médias oeuvrent à la même chose.
Est-ce pour autant qu’on considérera comme du pain béni toutes les informations parues dans la presse ?!
Cordialement
Les Sociétés que tu cites ont simplement fait un copié/collé des recos européennes de 2007 qui amplifient le mouvement instauré en 2003. Elles n’ont rien inventé.
la dénervation arrive et la décérébration continue!
@ Frederic
No problem, nothing personal!
Mais que proposez vous d’autre à part des comités d’experts? C’est en l’absence de ces comités et société savantes que nous nous retrouverions dans la situation que vous décrivez du chacun pour soi. Ceci dit comme vous moi non plus je ne considère pas une recommandation comme une obligation. C’est de la multiplicité de comités que viendra un équilibre. Ceci dit la base c’est quand même les essais publiés dans des revues à comité de lecture avec déclaration des conflits d’intérêt obligatoire. Les recommendations et les Comparative Effectiveness Recherche ne doivent pas prendre le pas sur, ni stériliser la recherche fondée sur les RCT (Randomised Controlled Trial) ou essais controlés randomisés.
Bien confraternellement.