Cholestérol, mensonges et propagande

Je viens de décider de m’arrêter définitivement à la page 214 (sur 319) du bouquin de Michel de Lorgeril, dont la lecture m’a été fortement recommandée par l’excellent @nfkb qui m’a même offert ce livre! J’ai quand même lu l’ensemble des annexes pour ne pas avoir de regret.

L’auteur, qui est un scientifique de valeur (son épreuve de titre est impressionnante, et il fut le premier auteur de la Lyon Diet Heart Study), a écrit ce pamphlet pour exposer sa doctrine: le cholestérol n’est pour rien dans l’athérosclérose, et les statines, molécules toxiques n’apportent aucun bénéfice. On parle beaucoup de cette théorie depuis l’annonce de la sortie du livre « polémique » des Prs Even et Debré.

Bref, malgré des réticences initiales de près d’un an (je lis des bouquins pour m’évader, pas pour bosser à la maison 😉 ), je me suis plongé dans ce livre de 2008 qui doit (ou a été récemment) ré-édité dans une version actualisée.

Difficile de résumer mon sentiment de lecture.

Il faudrait presque écrire un autre bouquin de taille similaire pour analyser un texte très dense et très documenté.

L’auteur analyse des dizaines d’études afin de confirmer son dogme.

C’est là que le bât blesse.

J’ai utilisé à dessein le terme de pamphlet, car malgré le curriculum de l’auteur et un vernis scientifique, ce livre est une magnifique illustration du biais de confirmation. Et l’ensemble des critiques que l’auteur adresse aux partisans de la théorie du cholestérol et des statines me paraît tout à fait pouvoir s’appliquer à son livre.

C’est dommage, car il explique très bien la mainmise de l’industrie sur la recherche scientifique, et sur l’ensemble des intermédiaires qui véhiculent l’information à nos oreilles. Il décrit aussi très bien l’hystérie des années 1990-2000 qui a conduit à la sur-prescription délirante des statines aujourd’hui.

Mais à côté, il écrit des trucs tellement énormes, dignes d’un visiteur médical, que cela décrédibilise totalement son propos.

Le plus dérangeant dans ce livre, véritable Évangile des myalgiques sous statines, est qu’une lecture rapide, ou faite par quelqu’un n’ayant pas le temps ou les connaissances pour vérifier ou analyser ce qui est écrit peut tout à fait être crédible.

Bref, ce livre ne m’a pas convaincu.

Faites-vous votre propre idée!

(Petit rajout: je donne quelques exemples tirés de ma lecture dans cette note)

17 Replies to “Cholestérol, mensonges et propagande”

  1. Même sentiment de tristesse:dèrive de la voix parlant dans le désert favorisée par les problèmes de carrière,l’indigence de la recherche publique thérapeutique,une psychologie HSP(?)…

  2. je ne savais pas quoi penser de ce bouquin… raison pour laquelle je t’ai offert ce cadeau empoisonné, j’avais le sentiment que tu pourrais disséquer froidement son propos mais apparemment il t’a trop énervé…

    Voilà ce qui m’embête avec cet auteur. Il dit probablement des choses très juste (son démontage de Jupiter à l’AHA me parait très bon : http://michel.delorgeril.info/public/AHA_Nov2012/img0.html ) Malheureusement il y a des choses qui dérangent, déplaisent, décrédibilisent :

    1) il n’emploie pas le ton « froid » de l’analyse, il prend trop parti pour sa théorie sans en énoncer les propres limites
    2) son caractère atypique le fait probablement souffrir de prêcher dans le désert mais son ton super-héros du grand public est irritant, je suis d’accord

    Mais moi je continue de croire qu’il y a des choses à en tirer parce que

    1) je sais aussi ce que c’est de vouloir faire des choses atypiques et d’être dénigré
    2) il répond à des attentes de patients qui ne trouvent pas d’écho dans la médecine académique
    3) à part la vente de ses livres il ne semble pas avoir de gros conflit d’intérêt dans l’histoire
    4) il a le mérite de remettre en question des dogmes, je trouve toujours ça « sain » comme attitude
    5) il y a une vraie morbidité liée aux statines sur laquelle la communication médicale s’assoit un peu (j’entends pas communication les articles, les congrés, les propos des leaders d’opinion)

    finalement je reste aussi un peu mi figue mi raisin

    merci d’avoir essayé 🙂 maintenant il ne me reste plus qu’à trouver un vrai bon bouquin pour compenser mon agression intellectuelle 😉

    1. Mouhahahahaha! Tu m’en as déjà envoyé un bon, Cul-de-sac!
      Sinon, même si j’ai souffert à la lecture de ce bouquin, je ne regrette pas.
      L’auteur est par ailleurs un personnage intéressant et curieux.
      Son propos est discutable, ce qui oblige à aller chercher/analyser/recouper ses dires. Certes, je ne suis pas d’accord avec lui, mais il m’a fait réfléchir.

  3. Je n’ai pas lu son livre, mais j’ai lu son blog and certains de ses articles, et je suis d’accord avec vous.
    Il m’a même dit que les membres de ma famille qui ont hypercholestérolémie familiale ne devrait pas prendre de statines. Je ne pense pas que c’est un bon conseil.

      1. Il dit:

        « Les hypercholestérolémies vraiment malignes sont également rarissimes et les données épidémiologiques que nous avons (données scientifiques dites d’observation) montrent plutôt que les personnes porteuses d’une HF hétérozygote ne sont pas victimes de leur cholestérol, peut-être victimes d’autres anomalies de la coagulation associées à leur anomalie du cholestérol, ou de leur mode de vie, peut-être … mais pas de leur cholestérol !
        Comment puis-je oser être aussi affirmatif ?
        En fait, nous disposons de très peu de données solides concernant la relation entre le cholestérol et le risque d’infarctus chez les personnes ayant une HF. Le meilleur argument possible consiste à faire un essai clinique en double aveugle pour vérifier qu’en baissant radicalement le cholestérol de ces personnes porteuses d’une HF, on améliore vraiment leur pronostic. »

        http://michel.delorgeril.info/cholesterol/jupiter/reponse-a-la-lettre-de-marilyn-mann-du-23-octobre

        Je pense au contraire que nous avons beaucoup de données épidémiologiques sur l’histoire naturelle des patients atteints d’hypercholestérolémie familiale. J’ai lu de nombreuses études à ce sujet. Je ne pense pas que cela ait quelque chose à voir avec les troubles de la coagulation sanguine. En outre, nous disposons de données d’observation que les statines réduisent la morbidité et la mortalité chez FH.

        Par exemple: http://www.bmj.com/content/337/bmj.a2423
        Vermissen, et al. Efficacy of statins in familial hypercholesterolemia: a long term cohort study. BMJ2008;337:a2423

        Je m’excuse pour mon mauvais français. Je suis Americaine.

        Avec l’amitié

        Marilyn Mann

        1. Je ne pense pas que c’est un bon conseil
          Je pense au contraire que nous avons beaucoup de données
          Niveau de preuve de cette pensée ?

           » Efficacy of statins in familial hypercholesterolemia: a long term cohort study. BMJ2008;337:a2423″
          Etude observationnelle ne prouvant rien par définition en terme de causalité. Et en plus l’abse,ce de randomisation ne permet pas d’affirmer un lien même sans causalité.

          1. Cher Dr. Gaston
            Il y a seulement tellement on peut dire dans un commentaire de blog. Il y a eu des essais contrôlés randomisés chez des patients avec un cholestérol élevé, qui n’ont pas eu FH, qui a montré un avantage. Il n’ya aucune raison de penser que si un tel procès avait été fait chez des patients FH, un avantage similaire n’aurait pas été démontré.

            Marilyn

  4. Moi qui croyait que tu lisais son premier livre , bien plus scientifique et moins polémique…. Mais plus long et ardu. Et convainquant. Dommage. Parce que je ne pense pas que tu voudras le lire.

  5. « … une lecture rapide, ou faite par quelqu’un n’ayant pas le temps ou les connaissances pour vérifier ou analyser ce qui est écrit … », ce qui est manifestement votre cas, au vu de l’absence de tout argument précis dans votre diatribe où tout contenu réel est désespérément absent.

    « pamphlet pour exposer sa doctrine », « L’auteur analyse des dizaines d’études afin de confirmer son dogme. C’est là que le bât blesse. », « un vernis scientifique », « il écrit des trucs … énormes, dignes d’un visiteur médical », qui « décrédibilise totalement son propos », « une magnifique illustration du biais de confirmation », « véritable Évangile des myalgiques sous statines », etc. à l’avenant …

    Admettons si ça peut vous faire plaisir … Mais encore ?

    On aurait aimer quelque chose de concret, une erreur clairement relevée, un exemple précis d’ineptie, un point spécifique contré, voire une critique construite. On aurait voulu vous voir, vous, faire mieux qu’un « visiteur médical ». Evidemment, cela vous dépasse et puis c’est tellement plus prudent de rester dans un flou tel que vous le pensez inattaquable !

    « On parle beaucoup de cette théorie depuis l’annonce de la sortie du livre « polémique » des Prs Even et Debré. » Sans doute dans votre milieu où il n’y a d’événement que médiatique …

    « Faites-vous votre propre idée! » Ah ça oui, merci. Sur vous aussi.

    Le plus drôle est de voir rappliquer aussitôt Marilyn Mann, toujours la première pour les attaques ad hominem contre Michel de Lorgeril, dans toutes les langues. Mais elle, c’est depuis la critique de JUPITER (Lorgeril et al., « Cholesterol Lowering, Cardiovascular Diseases,
    and the Rosuvastatin-JUPITER Controversy », Arch Intern Med. 2010;170(12):1032-1036) qu’elle est apparue.

    Bien avant que vous ayez compris qu’il se passait quelque chose …

    1. OK, merci. Mais je parlais de preuves. Ici, on n’a qu’une « association » dans une étude rétrospective dont la section « methods » ne mentionne pas le mode d’adjudcation des diagnostics , ni l’utilisation des recommendations pour les études retrospectives.
      Cette étude a de jolies courbes. MAis elle n’apporte pas d’élémet de preuve à mon sens.

Laissez une réponse

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.