Baissez les lumières, rapprochez-vous, je vais vous raconter une histoire de cardiologie à faire peur.
Il y a trois ans de cela, un monsieur, vers le milieu de la quarantaine, a commencé à présenter des oppressions médio-thoraciques au cours de ses ballades de 10 à 15 km en vélo.
Sans être à proprement parler sportif, il maintenait sa forme en faisant régulièrement du vélo et de la marche. Oh oui, j’oubliais, il n’a jamais jamais jamais fumé, et n’a aucun des autres facteurs de risque cardio-vasculaire.
Il consulte alors son médecin généraliste qui l’envoie chez un cardiologue.
Ce dernier, lui fait faire un test d’effort et une échographie cardiaque, qui reviennent normaux tous les deux.
Le patient a donc continué ses parcours en vélo en ayant à chaque fois son oppression thoracique. Il s’arrêtait l’oppression disparaissait, il reprenait, l’oppression réapparaissait. A chaque fois, au bout de 3 à 4 arrêts, comme libéré, il pouvait alors lâcher la cavalerie, et terminer son trajet, sans que l’oppression ne le gène de nouveau.
Comme les examens étaient rassurants et comme il avait trouvé un modus vivendi avec sa douleur, les choses se sont poursuivies ainsi 3 ans, à raison de 3 à 4 fois par semaine.
Puis récemment, la douleur est devenue plus fréquente, plus lente à disparaître, pour des efforts de plus en plus faible, jusqu’à ce que finalement elle ne disparaisse pas et le conduise à l’hôpital.
On a alors diagnostiqué un authentique syndrome coronarien avec à la coronarographie un réseau coronaire à faire se dresser les cheveux du cardiologue le plus aguerri:
Lésions tritronculaires avec thrombose chronique de l’IVA, reprise par la coronaire droite. Sténose serrée de l’angle C2-C3 [au niveau de la coronaire droite]. Sténose à 60% de la première marginale.
On a posé une indication de pontage rapide qui devrait être réalisé en fin de semaine prochaine (si il ne souffre pas de nouveau).
Son ECG actuel:
Regardez les territoires ischémiés et comparez-les avec les lésions anatomiques. La séquelle de nécrose semi récente est en inférieur, et il n’y a rien en antérieur…
Pourtant c’est l’IVA qui est occluse. Merveilleuse collatéralité naturelle…
L’histoire est impressionnante.
Aucun facteur de risque, un angor d’effort non traité, stable pendant 3 ans.
Cette histoire est fascinante, terrifiante (pour le médecin et les patients), et très informative sur la maladie extraordinairement complexe qu’est la coronaropathie.
°0°0°0°0°0°0°0°0°0°0°0°0°
Cette note a été publiée en avant première en mode public sur mon compte Google+.