Nouvelles recommandations pour la prise en charge de l’ACFA

Les nouvelles recommandations européennes sur la prise en charge de la fibrillation auriculaire sont disponibles depuis peu sur cette page.

Je me suis jetté sur le chapitre4.1 (pages 11-24) qui concerne le traitement antithrombotique.

Les auteurs confirment l’importance du score CHADS2, mais souhaitent l’affiner en rajoutant de nouveaux paramètres dans les cas difficiles, par exemple dans les cas ou ce score est à 0 ou 1.

Ce score affiné s’appelle, prenez votre respiration, le CHA2DS2-VASc.

Vous en trouverez les composantes page 14.

Mais on peut aussi très bien suivre le diagramme suivant:

OAC c’est pour Oral AntiCoagulant, ce qui ménage la place aux nouvelles molécules.

Je suis aussi allé voir comment s’était intégrée la dronédarone dans ces recommandations.

De façon un peu surprenante, pas mal:

HT: hypertension, CAD: Coronary Artery Disease, LVH: Left ventricular Hypertrophy.

Bonne lecture!

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un excellent article de synthèse:

Dr Walid Amara. Les nouvelles recommandations européennes sur la FA « collent à la pratique ». theheart.org. [International Editions > Édition française > Sections > Actualités > Rythmologie]; 30 août 2010. Consulté à http://www.theheart.org/article/1115165.do le 30 août 2010 . 

 

Dessous le tapis

Quand un essai clinique est positif pour une nouvelle molécule, le sponsor, le plus souvent la firme pharmaceutique va tout faire pour en diffuser Urbi et Orbi les résultats. En pratique, cela consiste à proposer le manuscrit à la revue la plus prestigieuse possible et d’en diffuser le tiré à part ou le résumé par voie de presse, par la VM…

Par contre, lorsque l’essai est négatif, ou jugé gênant, que faire?

Avant, la firme pouvait très bien choisir de ne pas en publier les résultats. Mais ça s’est vu, notamment pour l’ezetimibe et l’essai ENHANCE.

Maintenant, il est donc plus difficile de balayer un essai gênant sous le tapis, notamment depuis la création du registre clinicaltrial.gov.

Mais on peut quand même minimiser son impact, on va voir comment.

Prenons l’exemple de la dronédarone (Multaq®):


  • Essais ADONIS et EURIDIS: la dronedarone fait mieux que le placebo dans le maintien du rythme sinusal, essais positifs, publication conjointe dans le NEJM en septembre 2007.


  • Essai ANDROMEDA: surmortalité de la dronedarone chez les insuffisants cardiaques sévères. Essai arrêté précocémment en 2003, publié très tardivement dans le NEJM en juin 2008.


  • Essai ATHENA, plutôt positif, publication dans le NEJM en février 2009.


  • Essai DYONISOS: la dronedarone est moins efficace que l’amiodarone mais a moins d’effets secondaires, essai publié dans le Journal of Cardiovascular Electrophysiology en avril 2010.


Impact factor du NEJM, autour de 50, impact factor du Journal of Cardiovascular Electrophysiology autour de 4.

Trois NEJM et un journal obscur, ça ressemble quand même pas mal à une manœuvre pour minimiser l’impact d’une étude particulièrement gênante, non?

Vous allez me dire que ANDROMEDA pourrait aussi poser problème du point de vue du sponsor. Et de fait, elle a été publiée près de 5 ans après sa fin, mais dans le NEJM. Je présume que Sanofi l’a considérée comme peu gênante, car les patients insuffisants cardiaques sévères ne représentent pas une population très importante quantitativement.

Par contre, DYONISOS pose un vrai problème, car ça fait quand même toujours mauvais effet quand une molécule innovante est moins efficace que le traitement de référence.

Je suis curieux de savoir de quelle façon la VM présente ces études.

Parle-t-elle de DYONISOS, et comment ?

Ce n’est pas moi qui est ai eu l’idée de cette note, tout le mérite en revient à Larry Husten qui se pose la question dans cette note.





L’avis de la commission de transparence sur le Multaq

Vous vous souvenez de la spéculation qui a entouré le titre de Sanofi sur l’éventuel avis défavorable de la commission de transparence de la HAS sur le Multaq® (dronédarone)?

Et bien, ça y est, l’avis de la commission vient d’être publié sur le site de la HAS.

Le Multaq® sera remboursé à 65%:

Avis favorable à l’inscription sur la liste des spécialités remboursables aux assurés sociaux (B/60) et sur la liste des médicaments agréés à l’usage des collectivités et divers services publics (B/60 et B/100) dans l’indication et aux posologies de l’AMM.

Conditionnements : adaptés aux conditions de prescription

Taux de remboursement : 65%

Mais son ASMR est bien V:

MULTAQ n’apporte pas d’amélioration du service médical rendu (ASMR V) par rapport à l’amiodarone dans la prise en charge des patients adultes cliniquement stables présentant un antécédent de fibrillation auriculaire (FA) ou actuellement en FA non permanente mais représente un moyen thérapeutique supplémentaire utile.

L’intégralité du rapport est ici.


Bon, c’est bien ce qu’il m’avait semblé…

Pour quelques patients de plus…

Je suis tombé via @cardiobrief sur un article du Journal Sentinel qui s’intéresse à la dronédarone (Multaq®) et à l’étude ATHENA en particulier.

L’article est très critique et tire à boulets rouges sur cette molécule et Sanofi.

Bon, il y en a à prendre et à laisser.

J’ai trouvé deux choses dignes d’intérêt.

La première, la transcription de la réunion d’une commission de la FDA qui a statué sur la demande d’AMM de la dronédarone aux États-Unis le 18 mars 2009.

Bon, il y a 334 pages (j’en ai lues quelques unes) et c’est parfois très technique, d’autant plus que les participants discutent de diapos que l’on ne voit pas. Mais cette réunion a rassemblé des sommités en cardiologie et les quelques échanges que j’ai lus sont instructifs et vifs.

Je rêve d’une telle retranscription pour des réunions semblables en France.

L’article mais aussi la transcription du débat (ça commence à la page 254, mais ça devient torride à la page 257) m’ont fait découvrir un détail assez étonnant sur ATHENA.

Un des critères secondaires positifs  dans la publication du NEJM fut la mortalité cardiovasculaire:

There were 63 deaths from cardiovascular causes (2.7%) in the dronedarone group and 90 (3.9%) in the placebo group (hazard ratio, 0.71; 95% CI, 0.51 to 0.98; P=0.03)

La dronedarone peut ainsi s’attribuer une diminution de 29% de la mortalité cardio-vasculaire.

Mais en fait, au cours d’une analyse intermédiaire faite sur 4300 patients (analyse avouée du bout des lèvres page  258), ce critère secondaire était négatif:

And for cardiovascular death, it is 0.747, with boundaries of 0.54 and 1.04.

Le comité de pilotage de l’étude a décidé de prolonger la durée d’inclusion, ce qui a permis de rajouter 337 patients de plus, et la différence de mortalité cardio-vasculaire est devenue significative.

Strictement rien ne permet de penser que Sanofi était au courant de ces résultats intermédiaires.

Ce qui m’a impressionné dans cette histoire, c’est qu’il faut bien peu de choses pour faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre du 1 et qu’il faut donc toujours se méfier des intervalles de confiance qui frôlent de trop près cette limite qui fait qu’un traitement est efficace ou non.

En effet, l’article du Journal Sentinel parle de 5 décès dans le groupe placebo et de 1 dans le groupe dronédarone, survenus chez les patients inclus grâce à cette prolongation.

La commission a néanmoins tiqué sur ce point précis et a décidé de ne pas indiquer dans les RCP de la dronédarone qu’elle permettait de diminuer la mortalité cardio-vasculaire:

MULTAQ is an antiarrhythmic drug indicated to reduce the risk of cardiovascular hospitalization in patients with paroxysmal or persistent atrial fibrillation (AFib) or atrial flutter (AFL), with a recent episode of AFib/AFL and associated cardiovascular risk factors (i.e., age >70, hypertension, diabetes, prior cerebrovascular accident, left atrial diameter ≥50 mm or left ventricular ejection fraction [LVEF] <40%), who are in sinus rhythm or who will be cardioverted.

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Hohnloser, Stefan H., Crijns, Harry J.G.M., van Eickels, Martin, Gaudin, Christophe, Page, Richard L., Torp-Pedersen, Christian, Connolly, Stuart J., the ATHENA Investigators, Effect of Dronedarone on Cardiovascular Events in Atrial Fibrillation. N Engl J Med 2009 360: 668-678.

Doctors’ role in drug studies criticized Some recommend drugs, vouch for studies but don’t see raw numbers. By John Fauber of the Journal Sentinel. Posted: May 30, 2010.

FDA Center for Drug Evaluation and Research. Cardiovascular and Renal Drugs Advisory Committee NDA 22-425, dronedarone 400 milligrams oral tablets. Wednesday, March 18, 2009 7:59 a.m.