Placebo, Live at Montreux 2007

Je crois que je vous sors l’histoire à chaque coup, mais le « Special K. » de la dernière chanson n’est pas une marque de céréales mais une référence à l’usage détourné de la Kétamine que Brian, grand pharmacologue récréatif devant l’éternel, ne s’est probablement pas abstenu d’expérimenter.

Chaque fois que j’écoute cette chanson je pense aux quelques tamponnades que j’ai vues au bloc, induites en position assise avec de la Kétamine. Ce produit n’entraîne en effet pas de dépression hémodynamique (corrige moi nfkb0) ce qui est appréciable chez des patients qui sont alors au bord du gouffre.

A propos, hier j’ai récupéré le patient qui a tamponné devant moi la semaine dernière, et il se porte comme un charme après son drainage chirurgical.

Avoir à décomprimer une tamponnade en chambre a toujours été de très loin ma pire angoisse médicale #samediconfession.

Peu de choses me font peur en médecine, bien plus par inconscience que par maîtrise, notez-le bien, mais ça, ça me terrifie vraiment car je sais parfaitement ce que c’est.

Et comme je travaille en rééducation cardio-vasculaire, notamment en post chirurgie cardiaque, je ne vide pas si exceptionnellement que ça mes surrénales… 

Cette vidéo montre une péricardocentèse tranquillou (comme on dit à Marseille). Mais en vérité, quand le patient tamponne, il n’a plus ni tension ni pouls, il est semi assis dans son lit, tout le monde a de la sueur glacée qui coule entre les omoplates et surtout on n’a absolument pas le temps de faire le champ et de dessiner les côtes et le sternum au feutre noir.

Pour l’instant, merci les macro-molécules, l’adrénaline, et la chance, j’ai toujours réussi à y échapper. mais chaque fois, je sens le souffle du boulet.

Une autre particularité amusante (pour un cardiologue), réside dans une galénique originale expérimentée en anesthésie pédiatrique: la sucette de Kétamine (il existe des sucettes de fentanyl, je crois?).

J’ai l’impression qu’on en est revenu.

13 Replies to “Placebo, Live at Montreux 2007”

  1. La Kétamine, c’est juste magique.
    Je devance juste nfkb0, sûrement en train de s’envoyer en l’air par une journée pareille.
    Pour l’induction anesthésique d’une tamponnade, nous avons peu de choix. S’agissant d’une IC Dte aiguë, toute baisse brutale de la précharge (enfin, corrigez moi si je me trompe!) provoquée par les hypnotiques usuels envoient le patient au tapis. En théorie, les seuls produits utilisables sont la Kétamine ou l’étomidate.
    Personnellement, pour les (heureusement rares) fois où j’ai pu tremper dans ce genre d’affaires, la Kétamine a toujours eu ma préférence. La raison en est que pour une induction en position scabreuse (demi assise, pas facile) la Kétamine offre à mon sens des conditions d’intubation bien meilleures (relâchement, exposition de glotte). Ces données ne sont malheureusement pas confirmées par la fameuse littérature, il n’y a parait-il pas de différences entres les 2 drogues. N’empêche, chaque fois que j’ai la faiblesse de faire de l’étomidate, intuber devient un sport.

    On oublie l’autre intérêt majeur de la Kétamine, l’absence de dépression respiratoire qui autorise la ventilation spontanée (appréciable dans ce genre de situation où un passage d’une ventilation en « pression négative » -la ventilation physiologique, en dépression- à une ventilation en « pression positive » -celle produite par le respirateur- peut-être mouvementé). Pour le coup, c’est l’anesthésique de choix quand nous avons un accès à la tête délicat. Genre dans un fossé dans un reste de véhicule, par exemple.

    Je ne parle pas de la bronchodilatation offerte (utile en crise d’asthme), ou de l’effet à la mode (anti-hyperalgésique. Ce concept m’énerve), ou encore de son utilisation courante en humanitaire (la voie IM, autre trouvaille!)

    Bref moi, c’est pas les sushis. C’est la Kétamine. Seule ombre ne permettant pas son utilisation courante: l’effet « K hole » recherché par le raver mais sûrement pas par mamie tromblon. Dommage. Je m’étais laissé entendre dire (jamais retrouvé de référence valable à ce sujet) que et effet dit « psychodysleptique » était dû à sa parenté avec le LSD. Pas évident quand on compare la tronche des 2 molécules… Sûr qu’un pharmacologue émérite tel que vous saura m’apporter la réponse!

    Pour les sucettes chez les enfants, rien n’est cuit. Un enfant ça marche au goût. Essayez le midazolam PO, vous aurez un autre aperçu des statistiques!

    .

    1. Mouhahahahaha, merci beaucoup, ça rafraîchit bien les notions que j’en avais (« Surtout ne les intube pas »).
      Baisse de la précharge dans une adiastolie, Waterloo, morne plaine…
      😉

      1. Je me suis trouvé 2 fois armé du trocart en tremblant. On fait pas le fier. Et puis sans échoguidage, comme sur la démo, ça me parait difficile…
        Je ne parle pas l’espagnol (il doit s’agir d’une technique colombienne d’interrogatoire, non?) mais il a l’air d’attraper une plèvre au passage (l’air et l’absence de dépression à la seringue n’a pas l’air de le gêner…). Ce que j’en sais, c’est qu’au cours d’une thoracotomie médiane, ouvrir une languette pleurale sous-sternale, c’est banal. Pour drainer un péricarde, c’est sûrement pas fameux…

        Sûr qu’il vaut toujours mieux faire simple et ne pas intuber. Autre argument en faveur de la kéta! Et puis sans intuber au moins on peut toujours se dire qu’on ne tue personne… Autre façon de voir les choses!
        (on peut aussi intuber sans endormir. Pour les joueurs :-))

  2. Raccourci original de Placebo à la péricardiocentèse !

    Le fentanyl existe en effet en sucette (et aussi en spray nasal et en une sorte de « patch gingival »). Je ne sais pas si ces formes sont utilisées par les anesthésistes, j’en prescris en cancérologie. Ca rend de bons services pour le traitement des douleurs fulgurantes (les désormais fameux « accès douloureux paroxystiques » des labos), en plus d’un traitement de fond par morphinique bien évidemment.

    A l’inverse, je ne sais pas si les sucettes de kétamine sont utilisées en soins palliatifs, je me renseignerai.

    J’ai un souvenir ému d’une garde d’externe en cardiologie où j’ai assisté à un drainage péricardique « au lit ». Sensations garanties en effet !

    Pour une fois que je peu apporter un petit quelque chose, j’en profite pour vous dire merci pour ce blog, que je suis depuis assez longtemps maintenant sans me manifester dans les commentaires.

    1. Nous donnons assez peu dans la sucette il est vrai. Les voies IV et inhalées, avec une biodisponibilité proche de 100% (quand on n’en fout pas à côté) ont nos faveurs préférentielles. Le fentanyl est également le moins maniable des morphiniques en chirurgie (enfin tout est relatif).il faut savoir qu’une incision de péritoine ou de plèvre (richement innervées), c’est douloureux. Mais qu’une dissection des plans musculaires ou une suture de viscère c’est long et peu douloureux. Faut savoir s’adapter!
      En cancéro, la sucette, j’adhère. Voie PO, simple… Surtout quand rien ne passe. Le fenta existe aussi en voie transdermique (les fameux patchs). Je crois savoir aussi que les systèmes transdermiques/PCA (à la demande) ont été abandonnés. Dommage. Une histoire de problèmes de délivrance du produit avec la transpiration, il me semble. Cette solution paraissait intéressante…

  3. hey ! oh les gars on peut plus glander au bout du monde tranquillou ? 😉 (post card en train d’arriver)

    Ketamine Rocuronium (+ sugammadex à portée de main) est mon cocktail favori de l’induction en urgence et personnellement j’intube TOUJOURS mes malades assis en réa/SI/SC et SMUR si contexte le permet. J’aime bien faire le petti cabri sur les tête de lit. Je trouve l’axe pharyngo-laryngé toujours mieux visible.

    Ceci dit on ne gagne pas à tous les coups, ma patiente difficile de ma garde décrite récemment (au passwd très compliqué n’est-ce pas) était en début de tamponnade. Je me flagelle encore et j’y pense encore en vacances (grmblmlbm) de ne pas avoir fait d’ett avant de l’endormir celle là. Enfin bon, finalement c’est surtout la pression positive dans le thorax qui les démolit ceux là…

    Pour le reste John Snow est dans la place, tout baigne. Je rajouterais juste que concernant l’induction olé-olé des personnes-âgées-qui-vont-décarocher comme on dit chez nous j’opte pour la solution des doses infinitésimales d’hypnotiques classiques et je mets la ketamine dans la perf de base, un peu plus de 1 mg/kg (souvent 100 quoi, on fait pas de chichi en anesthésie). J’ai en effet lu dans l’excellent bouquin Ketamine de Georges Mion que le pic de concentration cérébrale est fortement impliqué dans la confusion post-op liée à la ketamine.

    JS : A propos de l’hyperalgésie, tu n’es pas assez proche de la frontière blege pour être imbibé du concept 😉 Je pense que nous ne revoyons pas assez de patient à long terme pour rechercher ce problème… de plus combien d’entre nous recherche des phénomènes douloureux en consultation d’anesthésie tout venant ? lié au pb actuel ou des chirurgies antérieures ? de plus l’utilisation intéressante du remifentanil (t’as vu j’ai fais gaffe) pousse à l’exacerbation de l’hyperalgésie, surtout s’il n’y a pas d’ALR associée.

    Quand à la ketamine, on peut aller encore plus loin que le fameux cocktail blue lagoon des humanitaires (ket/fenta/hypno) avec son utilisation envisagée dans l’espace ! Un des mes internes favoris a récemment présenté au Texas ses recherches là dessus, son topo est passionnant (available on request)

    Quant aux innombrables nouvelles formes de fenta qui se développe, je crois qu’on tombe à nouveau dans du cout/bénéfice favorable très souvent à l’industrie et un peu moins souvent au patient 😉 Prescrire nous rappelle que ça peut rendre des services mais peu régulièrement… et effectivement à part pour les chefs de service près de leurs sous le fenta c’est pas top…

    A propos des voies originales, je crois avoir lu l’abstract dans une revue indienne d’anesthésie à propos du gargarisme à la kétamine pour le fameux « sore throat » post-intubation. J’ai essayé sur une patiente qui ne se plaignait que ça (je ne disserterai pas ici des modalités d’intubation dans les blocs… John Snow a déjà suivi mon regard…) et bon ben l’expérience n’a pas été franchement concluante 😉 C’était une obèse, sans doute un problème de distribution 😉

    biz

    PS on recause quand tu veux d’anesthésie 🙂 et puis de lorgeril aussi un de ces 4 😉

  4. La tamponnade est une grande angoisse de néphrologue. La péricardite est assez courante chez nous, je pense qu’on fait drainer par le chirurgien, 4 ou 5 par an, souvent à la limite de la tamponnade. Le plus rigolo que j’ai vu, était un patient remis en dialyse qui accepté assez mal le retour et faisait n’importe quoi. Un jour, il arrive pour une plainte peu banale, il était gêné car chaque fois qu’il toussait, il avait le cœur qui s’emballait. Je l’ai envoyé rapido à l’écho, presque 1 litre dans le péricarde, direct au bloc. Depuis je me méfie toujours de ceux qui tousse avec le coeur qui a des ratés.
    La kétamine est toxique pour la vessie, quand utilisé pour des usages que nous qualifierons de récréatif… J’en avais parlé là: http://kystes.blog.lemonde.fr/2008/12/18/la-ketamine-sest-pas-bon-pour-la-vessie/

    1. Oui, je me souviens de ce papier.
      L’anesthésie moderne est née de la guerre ou de la recréation. Je ne ferais probablement pas le même métier sans ces petits « à cotés ». Cela vaut bien une vessie, sans doute! 🙂

    1. C’est une question de pression de remplissage du coeur notamment de l’oreillette droite.
      L’épanchement péricardique empêche le remplissage de cette dernière en lui imposant une surpression.
      La colonne de sang formée par la position demi-assise permet de maintenir une pression de remplissage de l’oreillette droite qui arrive plus ou moins (de moins en moins avec le temps…) à compenser cette surpression.
      Le patient ne sait pas tout ça mais il est néanmoins parfaitement incapable de se coucher.

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