Dronédarone et fibrillation auriculaire

Comme vous le savez, la carrière du Multaq® (dronédarone) est assez chaotique, pour employer un délicat euphémisme. Le dernier épisode en date est l’étude PALLAS, arrêtée pour une sur-morbidité assez nette dans le groupe dronédarone.

Nous avons donc reçu une Lettre aux Professionnels de Santé sur papier à en-tête de Sanofi, et signée du directeur des affaires scientifiques du groupe.

J’ai pris un cliché de mon exemplaire reçu par la poste:

Que remarquez-vous de curieux dans le PDF disponible sur le site de l’AFSSAPS (future ANSM), qui est une copie de ce courrier?

Quelqu’un à l’Agence a pris le temps d’effacer le logo de Sanofi.

Bon, il devait quand même être pressé ou manquait de moyens (une trop ancienne version de Paint ?), car il a laissé bien en évidence le bas de page avec le nom et les coordonnées de Sanofi:

(désolé pour la qualité de l’image, mais le PDF de l’Agence est déjà de qualité médiocre).

Pourquoi avoir pris la peine de cacher le logo d’un laboratoire pharmaceutique d’un courrier rédigé et envoyé aux prescripteurs avec la bénédiction des agences sanitaires?

Cela ne date certainement pas de l’après-Médiator, puisque par exemple cette lettre date de 2007.Le travail est néanmoins nettement plus soigné.

Pourquoi ne pas envoyer ces courriers avec le papier à en-tête des agences? Est-ce un problème réglementaire? Si quelqu’un a la réponse, je suis preneur.

En fait, je ne voulais pas vous parler de cela, mais d’une note du toujours très pertinent Dr. Wes qui se demande avec raison à qui on peut encore prescrire de la dronédarone.

La question est très théorique pour moi (et aussi pour lui, je le subodore), car je n’utilise pas ce produit (et comme c’est parti…).

Le Dr. Wes a donc reçu lui aussi un courrier de Sanofi et il est perplexe (comme moi) puisque la définition de fibrillation auriculaire permanente (qui contre-indique donc la prescription de dronédarone) est différente de la définition internationalement reconnue (par exemple, celle reprise par l’ESC en 2010) qui décrit 5 types de fibrillation auriculaire:

(1) Every patient who presents with AF for the first time is considered a patient with first diagnosed AF, irrespective of the duration of the arrhythmia or the presence and severity of AF-related symptoms.

(2) Paroxysmal AF is self-terminating, usually within 48 h. Although AF paroxysms may continue for up to 7 days, the 48 h time point is clinically important—after this the likelihood of spontaneous conversion is low and anticoagulation must be considered.

(3) Persistent AF is present when an AF episode either lasts longer than 7 days or requires termination by cardioversion, either with drugs or by direct current cardioversion (DCC).

(4) Long-standing persistent AF has lasted for ≥1 year when it is decided to adopt a rhythm control strategy.

(5) Permanent AF is said to exist when the presence of the arrhythmia is accepted by the patient (and physician). Hence, rhythm control interventions are, by definition, not pursued in patients with permanent AF. Should a rhythm control strategy be adopted, the arrhythmia is redesignated as ‘longstanding persistent AF’.

La définition donnée par les auteurs de PALLAS est en effet la suivante:

Permanent AF was defined by the presence of AF/atrial flutter (AFL) for at least 6 months prior to randomization and patient/physician decision to allow AF to continue without further efforts to restore sinus rhythm.

Comme vous pouvez le constater, tout est une histoire de durée.

En pratique, j’arrête le Multaq le 30ième (ou le 31ième jour ?) du sixième mois d’une fibrillation auriculaire persistante, ou permanente récente?

A minuit, le médicament devient dangereux?

Et pourquoi, à propos ? (n’est-ce pas plutôt à cause du au moins un facteur de risque cardio-vasculaire demandé à l’inclusion dans PALLAS?)

Le RCP de la dronédarone (dans sa dernière mise à jour du 20/07/2011) l’indique donc dans la FA non permanente. Cette indication a d’ailleurs été mise en exergue dans le courrier de Sanofi.

Je présume qu’il s’agit de la définition internationale, pas de la définition de PALLAS.

Et-alors-ou-bien-peut-être-comment-qu’on-fait ?

9 Replies to “Dronédarone et fibrillation auriculaire”

      1. Très peu, bcp d’intolérance digestive, et interrompue pour inefficacité chez les autres… Personnellement, je n’en ai pas prescrit!

  1. Quelle perte de temps, d’énergie et d’argent pour un médicament n’apportant rien de nouveau. Le labo pense vraiment s’en sortir ? Ou est-il résolu, à commercialiser le truc jusqu’au dernier moment pour grappiller un dérisoire de retour sur investissement.

    1. Je ne crois pas (?)
      At this time, patients taking Multaq should talk to their healthcare professional about whether they should continue to take Multaq for non-permanent atrial fibrillation. Patients should not stop taking Multaq without talking to a healthcare professional. Healthcare professionals should not prescribe Multaq to patients with permanent atrial fibrillation.

      1. C’est justement en lisant cela que je les sentais plutôt sceptique sur l’intérêt réel de la dronedarone!
        Peut être ai-je rêvé et simplement mal interpreté!

  2. Concernant l’avenir de ce « médicament », le suspens reste entier à l’échelle européenne:
    http://www.ema.europa.eu/ema/index.jsp?curl=pages/news_and_events/news/2011/09/news_detail_001332.jsp&murl=menus/news_and_events/news_and_events.jsp&mid=WC0b01ac058004d5c1

    L’Afssaps sur ce coup est encore un relais de communication du labo, ce qui n’est pas complètement illogique puisque l’interruption de l’étude a lieu à l’initiative du promoteur. Bien sûr le MULTAQ est un médicament qui nécessite au minimum d’avoir fait l’ENA et polytechique voire un doctorat en astrologie pour être prescrit.
    Les marchés n’ont pas besoin de comprendre cela mais juste de savoir que si MULTAQ n’est peut être plus le blockbuster promis, il a encore son intérêt (?!) et une AMM mondiale !

    La HAS fut aussi un relais de communication du labo lors de la rédaction de la 1ère fiche de transparence en 2010 à propos d’un article publié dans la Tribune! Là c’était franchement incongru!

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