AVK, pharmaciens et médecins, l’avis d’une non-professionnelle de santé

La nouvelle convention pharmaceutique a donc déclenché un débat intéressant mais parfois houleux entre professionnels de santé.

J’en ai parlé dans cette note, dont je vous conseille la lecture des commentaires. 

Parmi ceux-là, vous trouverez un petit mot de Agnès Pelladeau.

Cette maman d’un enfant sous AVK est impliqué depuis une dizaines d’années dans le suivi de ce traitement. Elle a créé AVK Control’, un site et une association d’information dont j’ai déjà parlé à plusieurs reprises.

Je l’ai contactée à la suite du commentaire pour lui proposer une tribune un peu plus étoffée via une note de Grange Blanche.

Elle a accepté très gentiment, voici donc son texte:  

Les AVK sont en France la première cause d’accidents iatrogènes majeurs, 17 000 hospitalisations, 4 000 à 5 000 décès par an.

La France a été classée au 28ème rang mondial sur 44 pays, loin derrière ses voisins européens pour le traitement des AVK.

Les pratiques actuellement en cours sont mauvaises et doivent être impérativement modifiées pour qu’enfin les patients français voient leur suivi s’améliorer.

Alors, avant de se demander à qui devrait revenir les 40 € par an, réfléchissons plutôt à ce qui pourrait être bénéfique pour le patient, ce qui pourrait améliorer sa sécurité, son traitement, sa qualité de vie. Demandons nous quelle serait la meilleure utilisation de ces 40 €, quelles organisations seraient les plus efficientes.

Vous comprendrez aisément notre opposition à l’accord, instituant un rôle rémunéré pour les pharmaciens dans le traitement des AVK, sans que, ni les associations de patients sous AVK, ni les professionnels spécialistes du sujet n’aient été consultés.

Pour autant, les pharmaciens font partie de la chaîne des professionnels de santé intervenant dans le suivi et doivent à ce titre y avoir un rôle défini et pourquoi pas différent de celui d’aujourd’hui. Comme nous aimerions que toutes les officines proposent des carnets de suivi, que les intéractions avec les médicaments soient systématiquement signalées lors de leur délivrance, que lors de la vente d’appareil d’automesure notre pharmacien (seul habilité à le vendre) soit capable de nous expliquer son utilisation.

Nous pensons que cet accord de valorisation du rôle du pharmacien n’est pas efficient et qu’il va à l’encontre de l’intérêt du patient.

La France doit développer des structures d’éducation comprenant un personnel spécialisé aux AVK comme les CAC (cliniques des anticoagulants) qui ont fait leurs preuves (temps d’INR passé dans la zone thérapeutique très supérieur au suivi classique, évènements thrombotiques et hémorragiques évités…) et dont les patients sont satisfaits. Elles sont
aussi aptes à former les autres professionnels de santé et à partager ainsi leur expérience et leur expertise.

Actuellement, elles proposent un programme d’éducation thérapeutique structuré traitant des différents aspects du traitement en s’assurant de la compréhension du patient. Cette exigence de qualité permet d’atteindre les objectifs de l’éducation .Mais ces séances ne sont disponibles que dans quelques structures hospitalières et devraient être étendues.

Chez nos voisins européens (qui font, je le rappelle beaucoup mieux que nous) elles sont largement développées et ont prouvé leur efficience.

Ces structures doivent être disponibles 7j/7 et 24h/24 comme le propose le CREATIF (CAC de l’hopital Lariboisiere) aussi bien pour les patients que pour les professionnels de santé.

Depuis le départ, notre association est engagée pour l’automesure et l’autocontrôle.

Encore une fois, nos pays voisins, plus efficaces, nous ont précédé dans les bonnes pratiques.

De très nombreuses études internationales démontrent que ce mode de suivi est de loin le plus efficace. De plus les patients voient leurs conditions de vie s’améliorer. L’autonomie et la responsabilisation sont des leviers les plus efficaces pour atteindre une qualité de suivi optimal. Bien sûr il faut au préalable une éducation thérapeutique mais là encore on s’aperçoit que les autotests responsabilisent le patient.

Les mesures d’INR peuvent être effectuées en cas de besoin à tous moments. Le patient sait qu’à l’introduction, le retrait ou les modifications de dose d’un médicament ajouté à son traitement, un contrôle rapproché d’ INR est indispensable. Lors de signes annonciateurs d’une mauvaise anticoagulation, il n’hésite pas non plus à vérifier son INR.

Des décisions peuvent alors être prises en connaissance de cause.

L’exactitude des résultats des autotests, leur disponibilité constante sont des éléments primordiaux de la sécurité du patient.

Agnès Pelladeau

Association AVK control

www.avkcontrol.com

Pétition « POUR LE REMBOURSEMENT DE L’AUTOMESURE CHEZ LES PATIENTS SOUS AVK« 

Pour plus d’informations : http://www.avkcontrol.com/autocontrole/petition.html

Votre participation est essentielle. Merci.

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Une dernière chose, Agnès Pelladeau et moi avons été interrogés par le Moniteur des Pharmacies sur ce sujet. L’article qui contient aussi d’autres points de vue sera publié le 5 mai.

7 Replies to “AVK, pharmaciens et médecins, l’avis d’une non-professionnelle de santé”

  1. Pétition signée, merci pour ce point de vue intéressant qui remet les choses en perspective au milieu de ce débat a 40euros. De toute façon je pense que l’autonomisation du patient dans toute pathologie chronique ou traitement au long cours est le meilleur moyen de prévention des complication.

  2. Merci Linoa.

    J’aimerais rappeler que, l’automesure de l’INR n’est remboursée que pour les moins de 18 ans sous AVK au long cours. Ces jeunes reçoivent une formation délivrée et validée par des centres référents (24 CHU).

    Mais passé l’âge de 18 ans, période de grands changements personnels et physiologiques, les frais de l’automesure deviennent à leur charge. 120 euros (ou plus :
    http://www.avkcontrol.com/autocontrole/tarif.html ) pour une boite de 24 bandelettes représente un investissement que beaucoup ne peuvent se permettent.Ces patients éduqués n’ont comme seule possibilité un suivi réalisé en laboratoire avec toutes les contraintes qu’il impose. Leur capital veineux devrait pourtant être préservé…

    Agnès Pelladeau
    Association AVK control

  3. Il est dommage que l’éducation thérapeutique chez les patients sous anticoagulants soit si peu développée dans notre pays.
    Car même si l’automesure de l’INR n’est pas utilisable par tous les patients,  elle pourrait jouer un rôle primordial dans la prévention des accidents iatrogènes. 
    Mais confier cette éducation au seul pharmacien n’est pas la solution.  C’est regrettable que ni les professionnels spécialistes  ni les associations de patients n’aient été consultés.

  4. Je suis infirmière et aussi sous AVK…. Je me rends bien compte de ce qui se passe des 2 côtés de la barrière.

    Je gère mon INR seule avec un appareil d’ autocontrole: le Coagucheck. il m’ est arrivé 2 ou 3 fois d’ appeler la CAC (Clinique des Anticoagulants), disponible 24h/24, 7J/7. Avec des interlocuteurs à la pointe de la connaissance et de la maitrise de cette gestion si particulière. Une organisation bien rodée, sûre et rassurante puisque disponible à tout moment qui me permet d’ être totalement responsable, autonome, rassurée et compatible avec des horaires de travail. Car en travaillant le matin par exemple, comment aller faire sa prise de sang d’ INR alors que la majorité des labos ne pratiquent cet examen uniquement le matin? Et quand tout se dérègle ça peut devenir vite un vrai casse-tête pour toute personne jeune, travaillant, dynamique, avec une vie de famille parfois…
    Pourquoi rajouter une organisation en parallèle de celle qui existe déjà? S’il faut rajouter à cela les horaires d’ ouverture des pharmacies….Quel en serait le bénéfice, l’ avantage?

    A domicile, les patients ont une relation de confiance avec leur infirmière. Très présentes tous les jours de l’année. Elles connaissent parfaitement les habitudes de vie de chacun de leur patient et peuvent donc plus facilement repérer les risques, les problèmes, vérifier les prises quotidiennes de leur traitment et ont accès à leur résultat d’ INR facilement et organiser la prochaine prise de sang. Il existe un trio Patient-Infirmière-Médecin traitant solide et fiable. Certain de ces patients ne se déplacent pas eux-même chez leur pharmacien ou 1 fois par mois minimum. Quelle serait dans ces cas là la qualité de la prise en charge?

    A l’ hôpital, ce sont aussi les infirmières qui distribuent les médicaments. Et ce sont donc elles qui donnent ce tout premier comprimé d’ AVK. L’ éducation thérapeutique commence à ce moment là pour le patient.et fait partie entièrement du rôle propre infirmier.

    Reste les patients autonomes, qui se déplacent eux-même au laboratoire mais n’ont pas de suivi particulier fait par leur médecin traitant et qui peuvent se déresponsabiliser, ne se rendent pas compte des vrais risques de ces traitements potentiellement dangereux s’ ils sont mal gérés, par manque d’ informations. Pour ces personnes là il faut faire connaitre l’ existence des CAC, encore très mal connues et pourtant existantes dans différents CHU de France qui ont pourtant fait leur preuve de leur bon fonctionnement avec un suivi complet des patients.

    Les pharmaciens auraient donc plus un rôle d’ information purement pharmaceutique (intéraction médicamenteuse, effets secondaires… ) qu’un rôle d’ éducation et de suivi de l’ INR chez ces patients.

  5. Pourquoi opposer, dans ce débat, l’évolution de la prise en charge à la pharmacie à celle du développement de structures spécialisées ayant comme vocation de participer à l’éducation thérapeutique du patient sous avk? Je rappelle qu’à l’Hôpital Lyon Sud, c’est une pharmacienne hospitalière qui réalise cette ETP et cela donne pleinement satisfaction. Dés lors, il me semble utile de repréciser que le pharmacien est celui qui est le mieux formé à l’usage du médicament. Si l’on souhaite qu’il consacre du temps, indépendament de la vente de ces médicaments bon marché, il n’apparait pas choquant que cela soit rémunéré. Si on considére les 4 à 5000 morts par an, que chacun ne prêche que pour sa paroisse me semble irresponsable. Ce n’est pas en affaiblissant les capacités du réseau pharmaceutique de proximité qu’on résoudra le problème et si il faut créer pour tous les problèmes de santé des hot-line et des réseaux spécialisés, cet éclatement non coordonné finira par coûter trop cher. Les patients , tous les jours, sollicitent l’avis de leurs pharmaciens et les 2 ordonnaces sur lesquelles je suis intervenu depuis l’ouverture de la pharmacie ce matin démontrent sans publicité tapageuse que ce travail est fait. Comme pour tout le monde, y compris le corps médical et infirmier, des progrès sont à envisager en liaison avec les besojns des patients.
    Développer l’autocontrôle me semble une excellente idée. Mais, l’exemple des diabétiques le montre, cela ne résout pas tout, et n’empêchera pas que l’échange avec le pharmacien de proximité garde toujours sa place. Aujourd’hui, aucune prise en charge ne saurait se concevoir de façon hyperspécialisée ou monodisciplinaire. Nous sommes à l’époque des transdisciplinarités efficaces.

  6. vaste débat, je suis pour l auto mesure des patients, et le plus problématique ce sont les patients âgés , qui ne se déplacent plus, ne comprennent plus rien ou n entendent que très mal : et là le trio médecin infirmier patient est le plus efficace, les infirmières sont elles rémunérées pour faire ce travail? les médecins le sont ils? faut il que les pharmaciens le soient pour le faire? J’ose espérer qu’ils le font déjà, et 40 euros finalement seraient à donner aux patients pour leur auto mesure et leurs bandelettes …..
    je suis généraliste à la campagne

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