J’ai reçu récemment un spam et une circulaire sur mes messageries électroniques.
Comme ça, rien de bien extraordinaire, mais les deux étaient intéressantes.
D’abord la circulaire émanant du Syndicat National des Spécialistes des Maladies du Cœur et des Vaisseaux (auquel je ne suis pas affilié, d’ailleurs comme aucun autre syndicat, pas de jaloux!)
Elle fait allusion à une affaire qui a frappé la communauté des cardiologues, juste avant celle du Médiator®, elle est donc passée particulièrement inaperçue d’autant plus qu’il s’agit d’un problème obscur de cotations d’actes.
Enfin, elle n’est pas passée inaperçue pour les confrères qui ont reçu un courrier de la CPAM leur demandant instamment le remboursement d’honoraires facturés de façon indue entre 2008 et 2010.
Pour faire simple, des confrères ont associé la facturation de plusieurs actes techniques en écho-doppler, alors que la CPAM l’interdit formellement:
Le contentieux porte sur le cumul d’actes d’échocardiographies et d’écho dopplers vasculaires. Pour information depuis la création du KE en 1994, le cumul des actes en KE est interdit. La mise en place des mesures transitoires de la CCAM, après un flou initial, a confirmé sans appel cette interdiction. A plusieurs reprises nous avons informé les adhérents soit par circulaire, soit par voie de presse dans le journal Le Cardiologue.
Et c’est exactement là que le bât blesse.
Comme l’indique la circulaire du Syndicat, ainsi que cet article du journal Le Cardiologue, dont les références sont excellentes, cette interdiction ne saute pas à la figure et est perdue dans les méandres des règles de la CPAM.
Il y a quelques semaines, j’ai essayé de chercher en vain le texte en question sur Ameli, j’ai même contacté un patient qui occupe un poste assez important à la CPAM, et il a été incapable de me donner des précisions sur cette interdiction (même après qu’il se soit renseigné…).
Ok pour respecter les règles, mais il faudrait qu’elles soient un peu plus faciles d’accès.
J’ai attendu avec un peu d’angoisse le courrier de la CPAM en me disant que j’avais bien dû faire une double cotation, moi aussi.
Mais je n’ai rien reçu.
En fait, j’ai la chance incroyable d’avoir comme meilleur ami un confrère cardiologue dont l’associé (vous suivez?) a eu des ennuis avec la CPAM il y a des décennies.
Nous nous sommes installés en même temps, et il m’a donc toujours exhorté, à la façon du petit-fils du marchand chinois dans Gremlins (ne pas l’exposer à la lumière, et plus spécialement celle du soleil, qui le tuerait. Ne pas le mouiller, et ne même pas lui donner à boire. Et le plus important, même s’il le demande et même s’il le supplie, ne jamais lui donner à manger après minuit!) de ne pas associer les actes d’échographie.
J’ai donc suivi à la lettre ces consignes, sans trop les comprendre, pour ne pas me retrouver avec des tas de Gremlins dans ma comptabilité.
Je compatis donc avec les confrères qui n’ont pas eu ma chance.
Malheureusement, la circulaire du syndicat leur laisse peu d’espoir:
Il semble vain de tenter des actions à titre individuel ; le recours gracieux est voué à des échecs systématiques et le recours au TASS s’annonce quasiment perdu d’avance.
(ne sachant pas si j’en avais le droit, je n’ai pas mis cette circulaire en ligne, si un responsable du syndicat vient à passer par là…)
Maintenant le spam.
Depuis quelques temps, je reçois pas mal de spam issu d’officines qui travaillent de façon plus ou directe avec l’industrie pharmaceutique sur mon adresse au CHU.
Bon, j’en jette la plupart, mais au milieu de tout ce pourriel, je suis tombé sur une lettre d’information titrée « Génériques : vraies/fausses rumeurs? ».
Je m’attendais donc au pire, et j’étais déjà abattu avant d’en lire le texte quand j’ai sauté directement sur la conclusion:
En synthèse
En l’état actuel des connaissances, rien ne permet d’affirmer que l’action thérapeutique d’un générique est différente de celle d’un princeps, notamment concernant le clopidogrel. Le médecin, dans un esprit citoyen veillant aux économies de santé doit prescrire en DCI (dénomination commune internationale) les médicaments inscrits au répertoire des génériques (article L5125-23 du Code de la Santé Public). La DCI est un langage commun, figurant sur toutes les formes de conditionnement d’un médicament ce qui peut conduire à faciliter l’utilisation du médicament.
Prescrire en DCI : c’est plus simple et plus clair pour le patient, le pharmacien et le médecin.
François Diévart, Cardiologue, Dunkerque
J’ai donc lu l’ensemble du texte qui m’a paru bien écrit, clair net et factuel.
Je n’ai pas été le seul à être étonné de la qualité de rédaction d’un texte envoyé par un message non sollicité et de sa conclusion qui était pour l’instant le credo rationnel d’un petit nombre, puisqu’un lecteur me l’a aussi fait parvenir.
Bientôt Prescrire va se mettre à offrir des règles ECG, des stylos et des clés USB…
(Mouhahahahahaha!)
A propos de Prescrire, je vous conseille de lire cet article du journal Le Monde. En tant qu’adhérent depuis pas mal d’années à l’AMP, je ne suis pas très objectif, mais il fait chaud au cœur. Tout y est dit:
« Prescrire, c’est l’honneur de la pharmacologie française, c’est une merveilleuse revue, totalement indépendante, mais elle n’est pas assez lue par les médecins. »
Didier Sicard.