Une femme de 87 ans a été admise pour une syncope.
Son traitement à 209.84 euros par mois, prescrit et délivré explique probablement en grande partie sa mésaventure:
Iatrogénie, vous avez dit iatrogénie?
Amusez-vous à trouver les interactions.
L’analyse par la base Thériaque est assez impressionnante:
L’association de médicaments qui allongent le QT (Sotalol et domperidone), bradycardisants (betabloquant et sotalol) et hypokaliémiant (furosémide) est admirable pour un cardio.
Le néphro peut être impressionné par l’association potassium et IEC à pleine dose et je pense que nous sommes tous admiratifs devant alprazolam+stresam+lorazepam à 87 ans.
Je remarque aussi la prescription de médicaments innovants: Onglyza® (saxagliptine) et Pradaxa® (dabigatran), qui tout le monde le sait, ont été parfaitement étudiés chez les sujets de plus de 85 ans.
Encore une fois, l’ami néphro a probablement pointé une des raisons d’une telle aberration. Faire admirer la délicate physiopathologie de maladies rares et comment quantifier une insuffisance mitrale par PISA à des étudiants en médecine est très valorisant. Faire apprendre quelques rudiments de pharmacologie et à soigner des patients en ayant du bon sens l’est de toute évidence moins.
Pourtant, c’est le socle de notre métier.
87 ans, vous vous rendez compte de cette folie ?!
On peut espérer que l’observance ne fut pas au rendez vous. Je ne sais pas ce qui me choque le plus. Le pradaxa à 87 ans, les psychotropes en association, les deux B bloquants, mon cœur balance.
L’inobservance sauve ! Mais le jour ou la grand mère va chez sa petite fille !!
» Mamie prends bien tout tes remèdes » => couic …
Il y a longtemps que j’ ai fait le ménage dans la pharmacopée de ma maman (87 ce mois).
Il reste ::
Simvastatine 20 mg/j (j’ ai l’intention de le sucrer bientôt)
Lormetazepam 2 mg le soir (vieille habitude qui sera difficile à déloger)
Timabak 0,50 % 1 goutte le soir (là, je n’ y touche pas)
Paracetamol 500 mg à la demande (trou de conjugaison, je ne la laisse pas avoir mal).
Tout le reste, poubelle.
Je regarde mes prescriptions chez mes patients à chaque renouvellement. Il y a quelques erreurs. Certaines que je sais et quand elles ne portent pas à trop de conséquence alors que le patient ne veut pas changer de traitement, je laisse. Et d’autres dont je ne m’aperçois pas, car j’ai « oublié » certaines règles de prescription. Lire Prescrire, des blogs, aller aux formations me permet de remettre tout à jour régulièrement. Et j’essaie de prescrire au moins et au mieux.
Mais j’étais l’autre jour à une thèse concernant la polymédication des sujets âgés. Les critères de « jugement » des prescriptions choisis étaient le Stopp et Start (comme ici : http://bit.ly/1dQ7uyb ) Et j’ai été gênée, par rapport à ces histoires de Stopp et Start. Comment traiter selon une « espérance de vie » supposée? Comment ne pas surmédicamenter quand il faut : un traitement pour le diabète, un pour la tension voire plusieurs, un pour l’anxiété, un pour l’osteoporose etc. Tant qu’on est seul dans la place, comme généraliste, on surveille ce qu’on prescrit. Et puis arrive l’hospitalisation ou le spécialiste et le patient entend que « son généraliste n’a pas prescrit de statine et que ce n’est pas normal » entre autres, et ressort avec une liste d’interactions longues comme le bras, fait des malaises, ou mange moins car déjà tous ses cachets le remplissent.
Je ne jette pas la pierre aux autres, je fais aussi des erreurs. Mais je constate que doser ses prescriptions à l’heure actuelle avec tant de recommandations qui ne vont que dans le sens de la prescription et non pas de l’abstention est un exercice difficile…
Le sotalex n’est pas le truc qui a comme effet secondaires des morts subites?
Tout cet argent foutu en l’air alors qu’on peut s’en sortir avec trois ou quatre maxi!
Oui, c’est un peu brutal quand même! Le sotalol allonge le QT, et est bradycardisant, donc à risque de torsades de pointes.
Ce n’est plus une soupe de sorcière, c’est carrément le bouillon de 11 heures !
Fallait pas laisser croire à nos confrères gériatres qu’ils peuvent promettre l’immortalité à nos patients ( qui deviennent assez rapidement les leurs d’ailleurs )
ce matin à l’hôpital deux demandes d’écho coeur de gériatrie, avec comme mention : FEVG ?:
1- femme de 92 ans, démente, bilan de chute, a déja eu une écho en 2011, sub normale pour l’âge ; commentaire de ma part : coeur présent
2- femme (toujours ! ) de 90 ans , pas démente mais ATCD ancien d’AVC, HTA simplex, pas de point d’appel cardio, AC/FA ancienne également, écho faite il y a 2 ans
commentaire de ma part : pour quoi faire ?
je vais finir par me faire mal voir…