Interchangeables

J’ai emprunté ce titre à une note de l’ami néphro puisque je me retrouve dans sa situation. J’arrête donc ma vacation au CHU après, pfff… une bonne dizaine d’années de bons et loyaux services.

J’ai bien lu sa note, qui m’a beaucoup touchée, et qui est tellement vraie, mais je n’ai pas eu le courage de dire à mes patients que je m’en allais.

C’est trop difficile.

J’ai été lâche et j’ai demandé aux soignants de la porte 6 de faire le sale boulot à ma place. Un des patients de ce matin m’a apporté une bouteille de Champagne et m’a souhaité bonne chance. Du Champagne, c’est la version moderne des 30 deniers, elle me nargue maintenant sur ma table de consultation.

J’ai été moins lâche avec les confrères, je leur ai envoyé un petit message pour leur dire que je partais. Travailler ensemble avec eux me manquera.

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Je pars sans aucune amertume, le CHU reste, et restera encore longtemps, je l’espère de tout cœur, le meilleur endroit pour se faire soigner et soigner.

Le spectacle continue, je serai remplacé et oublié, mais mes patients, qui ne sont pas interchangeables, me manqueront. Ils me manqueront individuellement et dans leur globalité.

Mon exercice va s’embourgeoiser, un peu comme moi. Je ne verrai plus de sans-papiers ou de malades du HIV.

J’espère ne pas oublier leurs histoires, j’espère ne pas perdre mon identité.