In the future, everyone will be world-famous for 15 minutes

Internet a permis à la prédiction de A. Warhol de se réaliser fractalement. J’ai trouvé deux histoires qui tournent pas mal en ce moment, et qui ont apporté la célébrité à leurs protagonistes.

La première est cette maman du Texas, prise d’un fou rire communicatif, lorsqu’elle déballe et joue avec un masque de Chewbacca. La vidéo a été vue 150 millions de fois et a fait l’objet d’un article du NYT. Le succès de cette vidéo tient à l’immense spontanéité du moment, sa bonne humeur communicative, l’absence totale d’artifices et aussi par l’emballement social et médiatique qui l’amplifie.

Facebook et Kohl’s se sont empressés d’accompagner le mouvement en déversant sur la famille une pluie de cadeaux pour cette dernière société. Là, on tombe dans le Disney, et c’est déjà un peu moins spontané…

Je trouve la seconde histoire plus intéressante car elle mêle deux sujets qui m’intéressent, l’art contemporain et… les lunettes. Deux copains visitent le SFMOMA. Ils s’interrogent alors sur la nature de l’art contemporain en découvrant certaines installations qui leurs paraissent moches, triviales, vides de sens, bref un aperçu de la majorité des pièces de la collection permanente du MAC. L’un d’eux place alors ses lunettes au sol…

La blague n’est pas spontanée car j’ai cru comprendre qu’ils avaient apporté et collé au mur un petit bristol, mais la réaction du public est intéressante. Il faut porter des lunettes de vue pour comprendre toute la tragique fragilité contenue dans cette paire posée au sol. Là aussi, l’histoire a fait un beau buzz avec notamment deux articles dans le Guardian (ici et ici) et dans BuzzFeed. La plupart des articles sont ironiques: Ah, les cons, ils ont pris des lunettes au sol pour de l’art… Une installation devient une œuvre d’art lorsqu’elle nous fait réfléchir et nous réfléchit. On pense bien sûr au Ready Made de Duchamp. C’est finalement très individuel, et une œuvre devient un chef d’œuvre lorsque qu’elle fait réfléchir et réfléchit un grand nombre d’individualités. Ces lunettes m’évoquent la fragilité, sont un pied de nez à l’art contemporain, et valident la géniale prédiction de Warhol. Elles méritent à mon sens amplement leur place au SFMOMA.

En écrivant cette note, j’ai découvert une autre œuvre d’art, « Left out » de Maxwell Rushton, remarquable et dramatique celle-là, par l’absence de réaction de la plupart des gens. Une parfaite réflexion de/sur notre société:

(merci à Golem13 de me l’avoir faite découvrir)

4 Replies to “In the future, everyone will be world-famous for 15 minutes”

  1. Il y a quelques années nous étions en reportage et nous tournions dans les caves d’une grande maison de champagne. dans une des galeries, un de mes collègues pose sa veste sur une palette contenant des centaines de pots de Nutella.
    A ce moment nous avons vu fondre sur nous un employé de la marque nous priant de faire cesser le sacrilège. la palette de Nutella était en fait une oeuvre incluse dans une installation d’un artiste qui exposait dans les caves.
    Ma passion de magritte aidant sans doute j’ai trouvé cette situation plus que surréaliste

  2. Pur un myope moyen dans mon genre, les lunettes, c’est surtout la seule façon possible d’accéder au monde visible intelligible. Sans être atteinte d’une myopie de type sévère, mes lunettes sont quand même mon accès au monde visible. Et pour le coup, je comprends le délire autrement, ou plus intimement.

    Sans, je vois un magma flou, dépourvu de sens, je suis comme un nouveau né sans défenses, parce qu’avec, je n’ai pas appris à me passer de mes yeux. Priver un myope moyen de ses lunettes, c’est le renvoyer à une forme aiguë de dépendance. La spatialisation est un besoin moderne, urgent.

    Et quiconque marcherait sur mes lunettes serait un bourreau.

    Les gens le savent bien, ce qui donne son sens à la performance. Ça me rappelle cet artiste qui a fait d’une plaque de givre, une oeuvre vierge. Evidemment, tout le monde a envie d’y mettre la main. Certains le font, et les gardiens de musée râlent.A raison, et à tory, parce qu’après tout, c’est le but, de donner envie d’y mettre la main. Tout comme toute lunette au sol donnera des envies d’écrasement. C’est normal, d’être traversé du désir d’écraser les lunettes au sol, juste pour voir. De la curiosité. Ce qui est en jeu, au delà, c’est le débat entre pulsion et culture, et c’est à çà qu’on est confronté, en face de ces œuvres.

    N’empêche que si ce sont mes lunettes, je mords pour les garder. C’est une extension essentielle de mes perceptions.

  3. Ce qui me fascine le plus dans l’entretien de la femme au masque c’est l’hystérisation collective de la société où, pour parler à la télévision, il faut hurler, se montrer, se rendre visible, crier, prendre à témoin, et faire croire que l’on est heureux. Je donne au mot hystérisation son sens freudien. Les talk-shows sont l’expression la plus basse de la « modernité « citoyenne ».
    Bonne journée.

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