Chaumière où du foyer étincelait la flamme,
Toit que le pèlerin aimait à voir fumer,
Objets inanimés, avez-vous donc une âme
Qui s’attache à notre âme et la force d’aimer ?
Les objets ont une âme si ils ont une histoire.
Le cartable de mes 40 ans en avait déjà une quand je suis allé le chercher chez Hermès.
Comme toujours, l’accueil fut impeccable, juste hautain comme il faut.
Malgré 5 ans de désir, je n’avais même pas vraiment réfléchi à sa taille (38 cm ou 40 cm?), au nombre de soufflets (1, 2 ou 3), à la finition de la fermeture (dorée ou palladium), et surtout au cuir et à sa couleur (il y a des milliers de combinaisons possibles). A priori, j’étais plutôt attiré par un cuir de type barenia noir ou beige (ou orange, soyons fous).
Je n’avais donc pas d’idée préconçue quand je me suis adressé au vendeur tiré à 4 épingles. Et ça tombait bien, car ils n’avaient que deux sacs à dépêches 38 cm en stock, et il faut compter 1 an de délai (voire plus) en cas de commande. Le premier était en cuir rigide, minimaliste avec deux soufflets, un point c’est tout.
Le second, en cuir togo très souple, possédait deux soufflets, une pochette et des poches intérieures.
Vous avez bien entendu! Des poches intérieures!
Un nouveau modèle, m’a soufflé le jeune homme, presque gêné par cette nouveauté apportée à un cartable immuable depuis 1937.
J’ai néanmoins été bien aise de constater que Hermès a enfin pris en considération les besoins de l’homme moderne qui se ballade avec des clés/clés USB/cartes/fils de recharge pour téléphones/stylos…
J’ai examiné les cuirs, et je suis tombé sous le charme du modèle souple. Son cuir togo est à la fois épais et souple, et son odeur, son odeur…
J’ai toujours aimé les cartables en cuir, les toucher et les sentir, mais là, je venais clairement de découvrir un autre monde, un autre horizon.
Énorme avantage par rapport à un plus aristocratique cuir barenia, le togo est presque insensible aux éraflures de la vie quotidienne (et il ne demande aucun entretien particulier). Alors que l’on peut marquer le barenia avec un malencontreux coup d’ongle un peu appuyé.
Je souhaitais pouvoir emmener mon cartable partout, sans me soucier des agressions extérieures. Je souhaitais un outil de travail, pas un fragile bibelot.
J’ai donc vite fait mon choix.
Mon cartable ne me quitte presque pas depuis 1 an. Pas une consultation, pas un séjour extra-muros sans qu’il m’accompagne. Il s’est embourgeoisé et a grossi à force de porter mon matériel, mais le toucher du cuir et son aspect extérieur sont toujours aussi fantastiques. Il transporte élégamment ma vie, mon moi.
Il symbolise aussi une chose essentielle à mes yeux: on ne finit jamais d’apprendre. Je serai toujours un écolier, avec mon cartable.
Autre chose fabuleuse, d’une discrétion infinie, il passe absolument partout. Il n’est pas comme d’autres qui arborent de gros monogrammes clamant à l’univers à quel point le propriétaire est fortuné, à défaut d’avoir du goût.
Une fois mon choix fait, le vendeur a souhaité me faire une fleur en me montrant un modèle exceptionnel de sac à dépêches en croco marron, comme celui-ci. Quand on connait la frénésie qui entoure, surtout en Asie, ce type d’articles, j’ai été impressionné. Mais je ne l’ai pas aimé, tellement inadapté à notre sensibilité européenne. Et puis, les crocos, ça doit pouvoir vivre tranquillement en liberté, pas en élevage de sacs à main.
Je conseille aux amateurs de sacs en cuir cet énorme forum qui est essentiellement féminin. Comme beaucoup de fora anglo-saxons, il regorge d’informations et les gens qui le fréquentent sont des passionnés, qui en général, répondront gentiment à vos questions.
Si vous voulez passer dans une autre dimension (vers l’infini et au delà), je vous conseille de parcourir ces sections/discussions:
- En premier, la section Hermès.
- Ici, les amatrices éclairées font des photos le plus souvent dérobées de femmes porteuses de Hermès, croisées dans la rue… Puis elles essayent de deviner le modèle/cuir/couleur… Surréaliste, surtout quand la photographiée est une habituée du forum.
- Le coin des hommes, est très très très très gay.
- La vie de Lutz, une richissime hong-kongaise. A parcourir, pour découvrir une autre vie.
- Pour les amateurs de Louis Vuitton, un autre sujet assez surréaliste: ces dames prennent en photo ce qu’il y a dans leur sac…
Souriez, soyez dérangés, indignés, mais ne vous moquez pas.
Toutes ces passionnées pansent notre calamiteux commerce extérieur et permettent de maintenir des emplois chez nous en achetant à des prix fous les quelques rares objets encore fabriqués dans notre pays.
Mon père, cardiologue, a utilisé deux serviettes Hermès dans sa carrière de 35 ans. La première lui avait été offerte pas son père. C’était à l’époque (1961) un objet de grande qualité, mais pas d’un luxe inouï comme maintenant.
Lorsque je me suis installé, j’ai récupéré sa deuxième, très usée, et je l’ai utilisée pendant 15 ans, tant j’étais amoureux de cet objet. Elle est désormais totalement morte et trouée de partout et je suis passé à contre-coeur à une mallette plus moderne et plus fonctionnelle.
Je te posterai une photo, car je l’ai bien sûr gardée comme relique.
Ah, les sacoches des médecins, c’est comme les vaches ^W cartables des profs 😉
avoir peu mais bien 🙂
Témoins de mes chagrins
Des premiers pas chancelants
Vigies de mes matins
De mes veilles de gisant
Empreintes de mes anciens
Qu’useront mes enfants
Porteurs de vagues d’âmes
Chéries en d’autres temps
Tels de fins épigrammes
Qui frôlent mon présent
Que j’aime donc le charme
De vos patines d’antan
C’est beau!
Quel bel objet sensuel.
Mais si l’âme n’a pas de prix, de nos jours, malheureuseument, comme le dit si bien notre confrère Dominique Dupagne, elle a, de plus, en plus un coût. O tempora, o mores.
Ils commencent à les fabriquer en Nord-Isère. J’ai vu plusieurs patients en reconversion qui se forment. Ca semble assez sympa, ils investissent fort et semblent bien payer leurs personnels. Et sont super exigeants sur la qualité du travail.
Un nouveau modèle ?! …
Nous frisons la congestion devant une telle audace !