journée chargée et cortisonée

Il y a des jours…

Un de ceux-là.

Je me lève avec une lombalgie carabinée, en tout cas la plus intense à ce jour. Un bi-profenid de la pharmacie familiale.

Arrivé à la consultation hospitalière, je pousse des petits cris à chaque déplacement entre le fauteuil et le tabouret sur roulettes de la salle d’échographie. L’infirmière, et l’aide soignante sont tout à la fois hilares et empathiques. L’élève infirmier me regarde carrément avec un regard inquiet.

Je prends 1 gramme de dafalgan et 40 mg de solupred, la journée peut commencer.

  • Une bombe brune en tanga hyper échancré et une poitrine débordante (littéralement). Des palpitations depuis qu’elle est avec son copain. « Ben, changez-en! » Grosse gaffe, le dit copain est le fils d’un membre du personnel de l’hôpital que je suis depuis des années. « Je plaisante, oubliez ce que j’ai dit, je ne tiens pas à avoir de problèmes!« . En fait il n’y a pas que le copain qui l fasse palpiter: 1 paquet par jour et une cafetière entière. On peut donc être brune et bête comme une blonde.
  • Un type qui sent le tabac, adressé en externe par un service pour une échographie cardiaque et un doppler artériel des membres inférieurs, alors qu’il était rentré pour anémie. Le bilan gastro est pour l’instant négatif. Quand il quitte la consultation, je lui ai trouvé une cardiopathie dilatée, une artère iliaque occluse et un énorme masse intra vésicale bourgeonnante et infiltrante , (la vessie est juste à côté de l’iliaque, et on la voit très bien quand elle est pleine, ce qui était le cas). Je crois avoir trouvé la cause de l’anémie. Courrier au médecin traitant
  • Un type d’une quarantaine d’année qui est resté 48 heures couché sur le ventre et sur son bras droit après être tombé totalement ivre d’une mezzanine  de 2.40 m de hauteur. Personne ne s’est inquiété de sa disparition durant 48 heures. Il sentait la pisse. Bien triste.
  • Un jeune type noir et efféminé, HIV+, pour une échographie cardiaque à la recherche d’une endocardite. Il est devin, a des « flash » qui lui permettent d’atteindre des niveaux de conscience supérieurs. Il a essayé toutes les drogues et dit avoir arrêté depuis des années. Uhhmm. Ah oui, il était « coiffeur-danseur » sur Paris dans une vie antérieure. « J’avais une vie sexuelle débridée« . Ben, mon gars, ça ne m’étonne qu’à moitié, ce que tu me racontes.
  • Un type insuffisant rénal qui a vu 3 médecins différents (1 généraliste et 2 spécialistes) dans les suites d’une thrombose veineuse profonde jambière. Curieusement, aucun traitement n’a suivi un traitement d’une dizaine de jours par héparine (pas la bonne, j’ai pensé à toi, Stéphane). Bilan des courses, il est essoufflé et la thrombose remonte maintenant jusqu’en haut de la cuisse. Pas un succès, pour sûr.
  • Une dame essoufflée. Devant une assistance de 4 externes et malgré un examen consciencieux, je n’ai pas trouvé de réponse bien tranchée… Elles auront au moins vu un cardiologue faillir.
  • Un confrère, généraliste à la retraite, qui me raconte qu’il a accouché deux de ses trois enfants. « A la maison? Mais non, dans une clinique, on n’était pas en 1930! » Ben quand même, ça paraît antédiluvien cette anecdote…(Il a fait son dernier accouchement en 1972 et a pris sa retraite en 1996).
  • Une dame bien rougeaude et bien diabétique qui chipote sur un terme du courrier de son médecin traitant: « imprégnation oenologique« . « Je suis pas alcoolique, juste un whisky le midi et l’apéro avec les copines! » Ben voyons! Et puis c’est écrit « oenolique » et pas « oenologique » sur le courrier!
  • Un confrère m’a proposé de faire une présentation à la con sur un sujet qui ne m’intéresse pas. J’ai refusé, peut-être un peu trop sèchement, peut-être sous l’effet du solupred. Bref, on commence à m’en parler… Mon épouse m’a dit que même sans corticoïdes, je réponds souvent sèchement non. Et comme vous le savez, il ne faut jamais parler sèchement à un numide (Le Domaine des Dieux, Goscinny et Uderzo). Gardez moi de mes confrères, je me charge de mes patients.
  • Un patient essoufflé au moindre effort, pas de solution évidente, ou au contraire elle l’est tellement… J’ai augmenté son lasilix, et je lui ai donné rendez-vous dans 1 mois.
  • Un autre patient, encore plus essoufflé, pas de solution évidente non plus. Mais pour lui, pas d’attente possible, hospitalisation rapide.
  • Et pas mal d’autres encore…

Mauvaise passe.

Coup de téléphone d’un généraliste hier.

Je l’avais appelé la semaine dernière pour lui dire que sa patiente avait une grosse phlébite ilio-fémorale gauche.

Mais son histoire est singulière.

Une dame de 68 ans, sans antécédent particulier présente peu avant les fêtes une grosse jambe gauche. Elle tarde un peu, mais ses enfants inquiets se faisant pressants,  elle finit par appeler son généraliste. Ce dernier suspecte une phlébite, et l’emmène illico aux urgences de l’hôpital avec sa voiture personnelle. Deux heures après, la patiente est dehors, après qu’on ne lui ait rien fait. Il semble que les urgentistes lui aient dit qu’elle avait déjà consulté pour cette jambe, et qu’ils ne pouvaient rien faire de plus.

Je récupère cette patiente à ma consultation hospitalière de doppler le lendemain.

Je retrouve la phlébite et appelle un copain assistant en cardio pour trouver une place à cette patiente. Ca tombe bien, son service est vide, il me la prend immédiatement.

Hier, avant d’avoir pu expliquer au généraliste que je n’étais que vacataire, il m’a dit de tout au téléphone sur l’état calamiteux de notre système hospitalier, en faisant bien sûr abondamment référence à l’actualité…

Que répondre ? Je trouve des tas d’explications et de circonstances atténuantes, mais les faits sont implacables. A cette heure, cette patiente, agent hospitalier à la retraite, compte porter plainte.


Lost in translation.

Consultation à l’hôpital.

Premier patient (une patiente)

Bonjour! Qu’est-ce qui vous amène?

?? Romanian, pas parler français

Ah, super!

Second patient.

Bonjour! Qu’est-ce qui vous amène?

?? Armenian, très peu français

Ah, super!

Troisième patient (une patiente)

Bonjour! Qu’est-ce qui vous amène?

?? (francophone mais complètement sourdingue)

Ah, super!

Pour le patient arménien, j’ai tenté un timide intchbess ess (comment ça va?) ? Mais comme toujours dans ces cas, il a pensé se trouver en face d’un locuteur arménien et a commencé un long monologue auquel je n’ai bien entendu rien compris. Après, j’ai eu toutes les peines du monde pour arrêter le flot et lui faire comprendre que je ne savais dire que intchbess ess ! En remerciement, il m’en a appris deux autres: Barev (bonjour) et ts’tesutyun (au revoir).

Il y a 2-3 semaines, j’ai aussi vu un patient pakistanais ne parlant qu’ourdou. Heureusement que son accompagnateur, un indien serveur dans un restaurant….indien, était parfaitement francophone. Et ce d’autant plus que je vais devoir adresser ce patient en chirurgie cardiaque pour un remplacement valvulaire aortique pour une insuffisance aortique massive…

La mondialisation en médecine n’a pas que du bon!

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